lundi 3 janvier 2011

Songe de la comtesse Aalais



Songe de la comtesse Aalais
Elle voit son fils vêtu d’un linceul
Aalais retourna à Cambrai, comme je l’ai raconté. Pendant trois jours elle ne mangea ni ne dormit, en se souvenant de son fils qu’elle avait injurié. Elle l’avait maudit; l’angoisse remplissait son cœur. Finalement, elle réussit à s’endormir car elle était épuisée. Et elle fit un songe qui ne s’avéra que trop. Elle voit Raoul, le hardi, de la bataille revenir, vêtu d’un linceul vert. Et Bernier l’avait tout déchiré. La dame fut remplie de peur. Elle sortit de la salle, rencontra Amauri, un chevalier qu’elle avait élevé. La noble dame l’appela avec un grand cri : « Au nom de Dieu qui ne ment jamais, où se trouve mon fils? » Celui-ci n’aurait pu répondre, même pour le fief de Ponthieu. Il avait une blessure faite par un dur épieu bruni. Et il allait tomber de son destrier arabe, quand un bourgeois le reçut dans ses bras. Une clameur s’éleva : Toutes les bouches disaient et on l’entendait clairement : « Raoul est mort et Guerri capturé! »

Anonyme
Raoul de Cambrai
France   1180 Genre de texte
Chanson de geste
Contexte
La comtesse Aalais fait un songe lui annonçant la mort de son fils Raoul, tué par son ancien ami, Bernier.
Texte original 3511 A Cambrai fu A., je vos di.
Ainc en trois jors ne me[n]ga ne dormi,
Tout por son fil qe ele avoit laidi.
Maudi l’avoit; le cuer en a mari.
3515 Un poi s’endort, qe trop ot consenti;
Soinga .j. soige qe trop li averi :
De la bataille voit R. le hardi,
Ou repairoit, .j. vert paile vesti
Et B. l’avoit tout departi.
3520 De la poour la dame c’esperi;
Ist de la sale, s’encontra Amauri,
.I. chevalier qe ele avoit nouri.
La gentix dame le hucha a haut cri :
« Ou est mes fix, por Dieu qi ne menti? »
3525 Cil ne parlast por l’onour de Ponti :
Navrés estoit d’un roit espieu burni;
Chaoir voloit del destrier arabi,
Qant .j. borgois en ces bras le saisi.
A ces parole es vos levé le cri,
3530 Qe partot dient, si c’on l’a bien oï :
« Mors est R. et pris i est G.! »

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