jeudi 31 mars 2011

Contenu latent


Le contenu latent est une notion introduite par Freud en 1900, en même temps que celle de contenu manifeste du rêve.
Le contenu latent désigne l’ensemble des significations auquel conduit l’analyse du rêve. Il est le produit du travail d’interprétation : les pensées du rêve (ou contenu latent) sont antérieures à leur traduction manifeste et l’analyse consiste à suivre le parcours inverse du travail du rêve. La mise au jour du contenu latent permet de retrouver une expression plus authentique, plus proche de la vérité, du matériel du rêve (par exemple, un désir de se disculper). Par extension, la notion de contenu latent est appliquée à toute production de l’inconscient. En psychologie projective, l’analyse de la production du sujet vise à dégager ses contenus latents. Mais on utilise le terme de sollicitations latentes pour rendre compte des contenus sous-jacents susceptibles d’être figurés par le matériel manifeste du test même.
En psychanalyse, le contenu latent est le contenu sous-jacent au contenu manifeste du rêve. Il subit le travail du rêve et devient conscient seulement à travers l’interprétation.
La notion de contenu latent, dans la théorie freudienne, est souvent associée au rêve* : elle s’oppose au contenu manifeste, et comprend l’ensemble des représentations inconscientes sous-jacentes au récit manifeste du rêveur. Le contenu latent du rêve est donc le sens symbolique du récit. De même, toute production de l’inconscient possède un sens caché, c’est le contenu latent.Dans un ouvrage écrit en 1899, L'Interprétation des rêves, Freud propose une nouvelle manière d'interpréter les rêves à travers le déterminisme psychique, c'est-à-dire la présence pré-existante de l'idée. Cette dernière utiliserait le rêve pour accéder à la conscience, sans être bloquée par les notions de bien ou de mal, pour faire passer l'idée en refoulant le désir, sans déclencher d'angoisse ou de culpabilité. Ainsi, le rêve serait l'expression camouflée d'un désir, possible à décrypter grâce à une méthodologie simple, qui consiste à connaître les interdits de la société agissant comme des filtres. Culture et éducation participent pleinement au camouflage du fantasme énoncé à travers un contenu latent et un contenu manifeste. Le contenu manifeste est alors le scénario du rêve tel qu'il apparaît dans le souvenir du rêveur, tandis que le contenu latent est l'ensemble des pensées refoulées, à l'origine du rêve mais dont le rêveur n'a pas conscience. Les "rêves typiques" touchent la plupart des gens et sont assez stéréotypés: tomber, être poursuivi, perdre une dent... Les enfants ont des rêves simples et non voilés, car les interdits sont peu nombreux. Pour les adultes, les rêves sont cohérents (bien que non motivés en apparence) ou incohérents et absurdes (les plus longs dans la majorité des cas). Plusieurs mécanismes servent à l'esprit pour constituer ces messages, comme la dramatisation (création d'un contexte narratif ou d'une situation), la figuration (sensations visuelles, rébus, expression imagée du désir...), la condensation (représentation par un seul élément du contenu manifeste d'une multiplicité d'éléments du contenu latent) ou l'inverse dans la dispersion, et enfin le déplacement (élément mineur du contenu manifeste qui acquiert une place centrale par le contenu latent).

 La théorie du rêve a servi de point de départ à la théorie des névroses puisque Freud a assimilé des productions oniriques aux productions névrotiques. Il a montré son intérêt pour les rêves dès le début de sa recherche, dès sa jeunesse il a noté tous ses rêves, dans sa correspondance à Fliess et à Jung. C'est l'étude des rêves qui a provoqué la rupture avec Jung.
I. La différenciation entre le contenu manifeste et le contenu latent
C'est l'apport essentiel de Freud à la théorie du rêve. La vie psychique se modifie au moment du sommeil et elle va fonctionner selon d'autres mécanismes. Le rêve nous arrive avec des caractères d'étrangeté et d'illogisme. Dans un premier temps, c'est ce caractère d'étrangeté qui nous permet de différencier le contenu manifeste et le contenu latent.
1. Le contenu manifeste
Freud : 'Le contenu manifeste désigne le rêve avant qu'il soit soumis à l'investigation analytique tel qu'il apparaît au rêveur qui en fait le récit, par extension on parlera du contenu manifeste de toute production verbalisée du fantasme à l'oeuvre littéraire qu'on se propose d'interpréter selon la méthode analytique.' C'est le rêve tel qu'il se présente, à l'état brut. C'est déjà différent du récit que l'on fait qui est lui-même une interprétation. Ce contenu manifeste a subit un long travail de déguisement qui est appelé le travail du rêve, pour accéder à la signification il faudra identifier le déguisement.
2. Le contenu latent
C'est l'ensemble des significations auxquelles aboutit l'analyse d'une production de l'inconscient, c'est le rêve déchiffré et le contenu latent n'apparaît plus comme un récit en images mais comme une organisation de pensées exprimant un ou plusieurs désirs. Il n'apparaît jamais tel quel à la conscience mais plutôt il se dévoile au fur et à mesure du travail d'interprétation.
Plus le contenu latent est déguisé plus il est loin du contenu manifeste, psychologiquement plus il y a refoulement plus la compréhension consciente est difficile. L'importance du décalage entre les deux contenus renseigne le thérapeute sur l'importance du travail à faire avec l'inconscient. Pour accéder au contenu latent, Freud a mis au point sa technique de libre association, premièrement on réduit le contenu manifeste en séquences constitutives du scénario, deuxièmement on demande au sujet d'associer sur chacune de ses séquences, troisièmement les fils d'association s'entrelacent et aboutissent à une trame de pensées et le rêve latent apparaît progressivement.
La technique psychanalytique consiste à tirer à la conscience les idées latentes à partir du contenu manifeste. C'est ce que Freud a appelé le travail d'interprétation.
II. Le dynamisme du rêve
Nous venons de voir que Freud soutient que le rêve manifeste a un sens latent que peut découvrir le travail psychanalytique et pour découvrir cela Freud va poser une deuxième hypothèse : 'tout rêve après complète analyse se révèle comme la réalisation d'un désir.' Pour justifier cela, il va d'abord prendre des rêves simples comme ceux des enfants c'est-à-dire ceux dont la réalisation du désir se manifeste sans déguisement. Par exemple, un rêve de sa fille âgée de 19 mois qui un matin a des vomissements, elle est mise à la diète pour toute la journée. Dans la nuit suivante, Freud l'entend crier au milieu de son sommeil agité et dans son rêve : 'Anna Freud, fraise, grosse fraise, flan, bouillie.' Interprétation : elle emploie son nom pour exprimer la prise de possession, elle énonce un menu qui comprend tout ce qu'elle aime, le rêve apparaît comme une revanche sur la diète imposée donc il est la réalisation d'un désir insatisfait pendant la veille. Les rêves des enfants appartiennent souvent à cette catégorie qui est celle de réalisation simple de désirs non satisfaits pendant la veille. A partir de l'étude de ces rêves d'enfants, il va tirer toute une série de conclusions :
- Le rêve enfantin compréhensible sans analyse est toujours une réaction à un événement de la veille. Il a un sens compréhensible immédiatement.
- Le rêve enfantin est la réalisation directe non voilée, non déguisée d'un désir non satisfait la veille.
Le rêve apparaît comme un compromis entre le désir et le besoin de dormir. La tendance à dormir est perturbée par le désir qui va exiger satisfaction. Le rêve permet la satisfaction du désir et il va écarter l'excitation perturbatrice qui aurait réveillé le dormeur. Le rêve sauvegarde le sommeil. 'Le rêve est le gardien du sommeil non son ennemi.'
Certains rêves d'adultes appartiennent à cette catégorie, ce sont les rêves provoqués par des besoins vitaux, la faim, la soif et les besoins sexuels. Par exemple, le rêve de banquets plantureux de personnes au régime ; ou les défilés érotiques de prisonniers. Ce ne sont pas la majorité.
La plupart des rêves se présentent déguisés, embrouillés et bizarres. La première hypothèse de Freud va se compliquer et devenir, le rêve est un compromis. Tout en dormant, on satisfait le désir et en satisfaisant le désir on peut continuer à dormir. Le désir est satisfait à un niveau symbolique ou encore fantasmatique. Par l'hypothèse de la censure, il va expliquer la déformation des rêves. La censure désigne une force qui exerce une action inhibitrice à l'égard de certaines tendances qu'elle reposse dans l'inconscient. Au niveau du rêve, on peut repérer cette action sur deux niveaux, des déformations systématiques qui empêche la compréhension, des résistances à l'analyse. Plus la censure est forte plus le rêve est déformé donc plus il est difficile à comprendre et plus difficile est l'intégration du contenu au conscient. La censure tient la place essentielle dans la conception freudienne du rêve. Le rêve n'apparaît plus simplement comme un compromis entre le désir de dormir et le désir perturbateur mais il résulte de l'interférence des trois forces, le désir de dormir, un désir plus ou moins choquant consciemment inhibé et la force de la censure. Le désir choquant ne franchi pas le barrage de la censure et pour se manifester et en même temps laisser le sujet dormir il va exister par des effets indirects et une nouvelle formule exprime la structure du rêve : 'Le rêve est la réalisation déguisée d'un désir refoulé.'
III. les mécanismes d'élaboration du rêve
Le travestissement du rêve est l'effet d'un travil aux mécanismes complexes : la condensation, le déplacement, la figuration, la symbolisation et l'élaboration secondaire.
La condensation : Laplanche et Pontalis : C'est le processus psychique inconscient par lequel des idées et des sentiments d'une personne se trouvent confondus et traduits d'une manière abrégée. Dans le rêve, cette condensation correspond à l'amalgame de plusieurs images en un composé méconnaissable. C'est la condensation qui explique que le contenu manifeste est toujours court par rapport au contenu latent. Le rêve manifeste apparaît comme un extrait incondensé. Freud fait l'analogie avec un portrait composite qui regrouperait en une seule personne les yeux d'une autre, l'habit d'une troisième, de là se composent des êtres étranges pas totalement inconnus mais en réalité c'est un amalgame de plusieurs êtres connus. Au niveau sémantique, la condensation est extrêmement riche puisqu'un seul contenu manifeste peut renvoyer à des quantités d'idées latentes.
Le déplacement : c'est le déplacement de l'affect ou de l'investissement libidinal. Par exemple, l'homme aux loups qui ne pleure pas à la mort de sa soeur mais qui éclate en sanglots sur la tombe de Pouchkine (poète romancier russe). Le rapport entre l'objet réel et l'objet substitutif est le plus souvent symbolique. Le résultat du déplacement est qu'il va apparaître au premier plan du rêve ce qui joue un rôle secondaire dans le contenu latent. Plus la censure est importante plus le déplacement est important.
La dramatisation, la figuration : la plupart des rêves se présentent comme une scène. Le travail de figuration sera de convertir des pensées en un scénario. Cela implique d'exprimer des idées par des images visuelles et de traduire des relations logiques existants entre ces individus. En ce qui concerne la figuration, le sujet apparaît rarement dans les rêve du fait de la censure. Mais la censure va déjouer le processus d'identification dans l'apparition masquée de la personne du rêveur. Cette apparition permet de savoir quelle est la partir psychique du sujet concernée par le rêve. Par exemple, si le héros est un enfant, c'est une partir de lui qui est en train de grandir, partie qui n'a pas encore la majorité adulte. Si c'est un vieillard, idée de fatigue ou de sagesse. Si malade -> propre déficience. Le rapport logique s'exprime par la simultanéité, c'est-à-dire que chaque fois qu'un rêve rapproche deux éléments, il y a un rapport de sens entre les deux. Le deuxième dépend du premier rêve. Ceci est valable pour les deux portions de rêves qui s'enchaînent dont le contenu manifeste est tellement différent qu'on a l'impression qu'il s'agit de deux rêves différents. Les portions de rêves qui s'enchaînent ont toujours entre elles un lien causal.
La symbolisation : le symbole est un mode de représentation indirect ou figuré d'une idée ou d'un contenu psychique. En psychanalyse, on considère comme symbolique toute représentation substitutive et en particulier tout symptôme pathologique est l'expression symbolique d'un désir. Ce mode de représentation se distingue par la contenance du rapport entree le symbolisant et le symbolisé inconscient. Une telle constance se retrouve non seulement chez le même individu tout au long de sa vie mais encore d'un individu à l'autre et également dans les domaines les plus divers et en particulier les mythes, les religions et le folklore. On le retrouve également dans les airs culturels les plus éloignés les uns des autres. On emploie le terme symbolique dans le rêve pour désigner la relation qui  uni contenu manifeste - contenu latent. Dès l'instant où l'on reconnaît à un contenu psychiquee au moins deux significations dont l'une se substitue à l'autre on peut qualifier leurs relations de symbolique. Ce langage symbolique échappe à la conscience individuelle. C'est un moyen d'expression à la disposition de tous au-delà des cultures et des langages. Le champ du symbole freudien est relativement limité et essentiellement sexualisé. C'est à Jung que l'on reconnaît le mérite d'avoir approfondi l'expression symbolique.
L'elaboration secondaire : Freud : c'est le processus par lequel l'esprit du rêveur introduit ses productions oniriques logiques plus ou moins artificielles. Ce remaniement du rêve est destiné à le présenter sous la forme d'un scénario cohérent et compréhensible. Ce travail peut être résumé de la manière suivante, une trame de pensées assemblées pendant le jour ne parvient pas à la réalisation, elle va donc conserver un certain pouvoir d'actions dans l'inconscient et menacer de troubler le sommeil pendant la nuit. Au cours de la nuit, ces pensées réussissent à se relier à des désirs refoulés dans la nuit passée. Grâce à la force fournie par ce soutien inconscient, les pensées diverses peuvent redevenir actives et surgir dans la conscience sous la forme déguisée du rêve. Deux faits se produisent, les pensées ont subit une transformation, un déguisement, des pensées ont réussi à investir la conscience grâce à ce déguisement et une partie de l'inconscient a pu surgir dans le conscient.
Conclusion : ce qui semble original est quele rêve freudien est un signe de la pensée, il exprime psychiquement la pensée. C'est un langage psychique naturel que chacun d'entre nous possédons. Langage indirect, symbolique, censuré, déformé dont l'interprétation est souvent difficile. La compréhension d'un rêve exige avant tout une attitude ouverte de renoncement à toute critique, tout préjugé, tout parti pris intellectuel ou affectif. Certains rêves ne trouvent leur sens que dans une série de plusieurs semainees ou plusieurs mois. Il faut parfois être capable d'interrompre puis de reprendre le travail d'interprétation mais c'est effectivement une voie royale qui nous fait accéder naturellement à la confrontation à l'inconscient, à ses contenus, ses mécanismes. En dehors des productions pathologiques et des activités créatrices nous avons peu de moyens pour accéder aux matériaux de l'inconscient.


La notion de contenu

Le terme contenu désigne l’information transmise à travers le discours. L’école de Palo Alto l’oppose au terme «relation». On distingue deux types de contenu : le contenu manifeste et le contenu latent.

Les notions de contenu manifeste et contenu latent sont empruntées à la psychologie freudienne.

Le contenu manifeste est ce qui est explicitement exprimé : Opinions, croyance… En ce sens, étudier le contenu d’un discours consiste à faire ressortir les thèmes les plus souvent abordés, les mots clés, les prises de position et les arguments invoqués pour les justifier…

Le contenu latent est tout ce qui exprimé de manière implicite. Étudier le contenu latent consiste donc à découvrir le non-dit. L’examen du contenu latent pourrait mettre en lumière la signification de la place accordée à chaque thème, l’absence de certains thèmes dans le discours, les valeurs non exprimées qui semblent découler des prises de position. Cette dernière problématique dépasse le cadre de l’analyse de contenu en tant que tel ; elle relève de l’analyse énonciative.

L’analyse de contenu 
L’analyse de contenu est « une technique de recherche pour la description objective, systématique et quantitative du contenu manifeste des communications, ayant pour but de les interpréter » (Berelson 1952).

Analyser le contenu d’un document ou d’une communication, c’est « rechercher les informations qui s’y trouvent, dégager le sens ou les sens de ce qui y est présenté, formuler, classer tout ce que contient ce document ou cette communication » (Mucchielli 1991).

L’objectif de l’analyse de contenu est donc d’expliquer les activités cognitives du locuteur (ses préférences thématiques, sa position idéologique, son attitude…)

L’analyse de contenu peut être quantitative ou qualitative.

Quantitative : Dans cette forme d’analyse, il est question de calcul de fréquence des éléments de sens identifiés comme pertinents.

Qualitative : A ce niveau, on considère les valeurs particulières des éléments linguistiques et les réseaux de sens. Dans la plupart des analyses de contenu, les deux aspects sont développés parallèlement.

Types d’analyse de contenu
Selon Mucchielli, il existe trois modes d’analyse de contenu :
L’analyse logico-esthétique, qui étudie la structure du discours en relation avec ses effets de sens. Cette analyse porte sur la forme de la communication, qui donne des informations sur l’état d’esprit du locuteur et ses dispositions idéologiques (vocabulaire, longueur des phrases, ordre des mots, figures de style, hésitations…). C’est le cas de l’analyse stylistique du discours.

L’analyse sémantique structurale, qui tend à définir le champ des significations d’un objet dans un ensemble cohérent donné.

Le but consiste à mettre en évidence les principes qui organisent les éléments du discours, de manière indépendante du contenu même de ces éléments. Dans ce type d’analyse on travaille non pas sur le vocabulaire, le lexique ou la thématique du discours, mais sur les principes d’organisation sous-jacents, les systèmes de relations, les règles d’enchaînement, d’association, d’exclusion, c'est-à-dire, toutes relations qui structurent les éléments de manière invariante ou indépendante de ces éléments.

L’analyse logico-sémantique, qui s’en tient au contenu manifeste, ne considérant que le signifié immédiat, accessible. Elle comprend trois moments.

a.- L’analyse thématique, qui permet de déterminer les thèmes développés dans le discours. Le but de cette analyse est de repérer les unités sémantiques qui constituent l'univers du discours. Pour réaliser cette tâche, on procède en deux étapes : La détermination des unités significatives et leur catégorisation.

b.- L’analyse du positionnement, qui permet de mesurer la distance idéologique du locuteur par rapport à ce qu’il dit. Cette analyse porte sur les jugements formulés par le locuteur. On peut calculer la fréquence de ces jugements mais aussi leur direction (jugement positif, négatif ou neutre).

c.- L’analyse fréquentielle, qui permet de comparer la fréquence des thèmes. Il s’agit des énoncés les plus répandus dans le discours des cadres d’entreprises. L’hypothèse est que plus la fréquence d’une idée est élevée, plus cette idée est importante pour le locuteur.

Le choix des unités d’analyse
L’expression linguistique donne lieu à des mots, des syntagmes, des propositions, des phrases,  des paragraphes, des actes de discours … Toutes ces formes peuvent constituer des unités d’analyse, dépendamment des objectifs de l’analyste. Mais selon Mucchielli, « pour l’analyste de contenu, l’essentiel est le sens et non la forme. Son découpage sera en principe autre que celui de la linguistique classique». Autant dire, les unités peuvent être de dimension inégale.

Fort de cette approche, le choix des unités est guidé par deux principes : Le principe communicationnel de l’informativité, qui veut que l’acte de communication apporte au moins une information nouvelle (le propos), et celui psycho-linguistique de la cohérence, qui préconise que toute information nouvelle activée s’appuie sur, au moins, une information ancienne (le thème). C’est-à-dire, chaque fois qu’un locuteur s’énonce, il parle de « quelque chose » et en même temps, dit « quelque chose »  à propos de ce dont il parle.

D’où, l’expression considérée comme unité d’analyse doit comporter deux dimensions : un noyau de sens, constituant le thème, et un indice de positionnement par rapport à ce noyau de sens (le propos).

La catégorisation
Il s’agit ici de la classification des thèmes du discours en fonction de leur apparentement sémantique. En considérant les unités d’analyse, on peut dégager un thème pour chaque unité. Mais quand on considère l’ensemble des thèmes, il doit être possible de les regrouper sous des catégories. Par exemple si on a comme thèmes d’un ensemble d’unités: parler sans contraintes, dire ce qu’on veut, droit à la parole…, on voit bien que ces expressions vont dans le même sens. Aussi au lieu d’avoir trois thèmes, il est préférable de les regrouper sous une catégorie que l’on peut appeler « liberté d’expression ». Ainsi, Pour un discours où il y a des dizaines de thèmes, il peut être possible d’avoir 5 ou 6 grandes catégories.

Étapes de l’analyse de contenu
Choisir un ou quelques discours (corpus)
Formuler des objectifs et/ou des hypothèses
Choisir un échantillon de discours
Préciser le type d’échantillonnage utilisé et le justifier
Déterminer les unités d’analyse
Faire une analyse contextuelle du corpus
Définir les catégories d’analyse en relation aux objectifs/hypothèses
Faire une analyse thématique du corpus pour mettre en évidence les thèmes dominants
Présenter le tableau des résultats mettant en relation les variables étudiées
Interpréter le tableau des résultats.





le texte du rêve de l’Homme aux loups


Ce rêve se trouve p. 190 du gardiner sous le titre « Le rêve et la scène originaire »
« J’ai rêvé qu’il faisait nuit et que je suis couché dans mon lit (les pieds de mon lit étaient tournés vers la fenêtre, devant la fenêtre se trouvait une rangée de vieux noyers. Je sais que c’était l’hiver, quand je rêvais, et la nuit. Tout à coup la fenêtre s’ouvre d’elle-même, et je vois avec grande frayeur que le grand noyer devant la fenêtre quelques loups blancs sont assis. Il y en avait six ou sept. Les loups étaient tout blancs et avaient plutôt l’air de renards ou de chiens de bergers, car ils avaient de de grandes queues comme les renards, et leurs oreilles dressées comme chez les chiens quand ils font attention à quelque chose. Dans une grande angoisse, manifestement d’être mangé par les loups, je criai et me réveillai. Ma bonne d’enfant se précipita vers mon lit, pour voir ce qui était arrivé. Cela dura un bon moment jusqu’à ce que je fusse persuadé que ce n’était qu’un rêve, si naturelle et si nette m’était parue l’image de la fenêtre qui s’ouvre et des loups assis sur l’arbre. Enfin je m’endormis comme délivré d’un danger… »
A propos du texte de ce rêve, il convient de faire deux remarques. La première à propos du fait qu’il n’est que le contenu manifeste du rêve et que ce qui constitue la méthode d’interprétation du rêve en psychanalyse, c’est la recherche de son contenu latent, soit des pensées inconscientes du rêve. C’est le moment où jamais à son propos de retrouver dans l’Interprétation des rêves ce que nous dit Freud du rapport entre ces deux contenus :
Le rêve comme transcription d’une langue dans une autre
« Toutes les tentatives faites jusqu’à présent pour élucider les problèmes du rêve s’attachaient à son contenu manifeste, tel que nous le livre le souvenir, et s’efforçaient d’interpréter ce contenu manifeste […] Nous sommes seul à avoir tenu compte de quelque chose d’autre : pour nous entre le contenu du rêve et les résultats auxquels parvient notre étude, il faut insérer un nouveau matériel psychique, le contenu latent ou les pensées du rêve, que met en évidence notre procédé d’analyse […] De là vient qu’un nouveau travail s’impose à nous. Nous devons rechercher quelles sont les relations entre le contenu manifeste du rêve et les pensées latentes et examiner le processus par lequel celles-ci ont produit celui-là. Les pensées du rêve et le contenu du rêve nous apparaissent comme deux exposés des mêmes faits en deux langues différentes ; ou mieux, le contenu du rêve nous apparaît comme une transcription ( Ubertragung) des pensées du rêve, dans un autre mode d’expression, dont nous ne pourrons connaître les signes et les rêves que quand nous aurons comparé la traduction et l’original ». L’interprétation des rêves, Le travail du rêve, p. 241.
On peut schématiser ainsi ce que Freud nous décrit des rapports entre le contenu latent et le contenu manifeste du rêve, par un double sens. Le sens qui va du contenu latent vers le contenu manifeste est en somme le mode de fabrication du rêve, sa formation (une formation de l’inconscient) ; dans l’autre sens, du contenu manifeste au contenu latent, c’est la technique de son interprétation. Pour le dire d’une autre façon, dans un sens, c’est le chiffrage du rêve, dans l’autre, son déchiffrage.
Tout ce qui accompagne le rêve, lui sert de commentaire, fait partie des pensées latentes du Si on lit maintenant le texte du rêve de l’Homme aux loups, qui est donc son contenu manifeste, on s’aperçoit qu’il est de fait composé de deux parties, une partie qui est à proprement parler le récit du rêve et une seconde partie qui est en quelque sorte le commentaire qui l’accompagne. Par exemple, la dernière phrase qui a été mise en italique par Freud est celle qui mérite toute notre attention : « Dans une grande angoisse, manifestement, d’être mangé par les loups, je criai et me réveillai. »
En effet Freud nous l’indique, tout ce qui accompagne le rêve, ses commentaires, font partie intégrante des pensées latentes du rêve, il nous met donc déjà sur la voie de son interprétation quand il ne nous dévoile pas l’interprétation elle-même (p. 286). « Les commentaires au sujet du rêve, des remarques en apparence innocentes servent souvent à dissimuler de la façon la plus raffinée un fragment de ce qui a été rêvé ; en réalité d’ailleurs, ils le trahissent ». Il en donne deux exemples. Voir fichier joint à propos des lacunes du rêve.
Cette remarque se confirmera, à propos du commentaire de ce rêve des loups, tout à la fin du récit de Freud et encore plus quand, il reprendra, dans son texte beaucoup plus tardif celui d’Inhibition, symptôme, angoisse, les deux phobies de l’Homme aux loups et du Petit Hans, pour l’un, son angoisse sera celle d’être dévoré par le père-loup, pour l’autre, l’angoisse d’être mordu par le père-cheval. Or cette angoisse se lit en clair dès la première formulation de ce rêve. Tout y est déjà dit mais c’est en quelque sorte en marge du texte du rêve.
  

Constructions (en analyse)


Dans "Constructions en analyse", Freud écrit :  "L'intention du travail analytique est d'amener le patient à lever les refoulements des débuts de son développement... pour les remplacer par des réactions qui correspondent à un état de maturité psychique".
L'analyste ne peut travailler pour cela que sur la matière psychique que lui fournit l'analysant, "des fragments de souvenirs contenus de façon déformée dans les rêves", des souvenirs écrans mais aussi "des idées incidentes qui émergent lorsqu'il se laisse aller à l'association libre" et enfin "des actions plus ou moins importantes du patient à l'intérieur ou à l'extérieur de la situation analytique qui mettent en scène avec l'aide du transfert les souvenirs oubliés et favorisent aussi le retour des affects appartenant au refoulé."
Comment avec tous ces matériaux psychiques pouvons nous retrouver le chemin de ces souvenirs perdus ?
Freud utilise, pour décrire sa démarche une métaphore théâtrale: Le travail psychique consiste en deux pièces distinctes qui se jouent sur deux scènes séparées et concernent deux personnages dont chacun est chargé d'un rôle différent".
Dans ce travail, l'analyste devient en quelque sorte le régisseur chargé de maintenir des liens entre les deux scènes, les deux pièces de théâtre qui s'y jouent et surtout entre les protagonistes du drame. Ainsi pour maintenir cette métaphore, lorsque l'analyste communique à son patient les constructions qu'il a échafaudées, il établit pour un court moment un lien entre les deux scénarios.

Mais ces deux scénarios ne peuvent être les mêmes. Freud le précise ainsi :
« Nous savons tous que l'analysé doit être amené à se remémorer quelque chose qu'il a vécu et refoulé, et les conditions dynamiques de ce processus sont si intéressantes qu'en revanche l'autre partie du travail, l'action de l'analyste, est reléguée à l'arrière-plan ».
A noter que cette action de l'analyste, Lacan l'appellera beaucoup plus tard « l'acte analytique » et ce,  pour lui aussi,  l'opposer radicalement à ce qu'il nommera « la tâche psychanalysante » marquant bien le fait que c'est avant tout l'analysant qui travaille, qui entreprend son analyse. 
Il poursuit, à propos de ce qui est la part de l'analyste dans cette tâche :
De tout ce dont il s'agit, l'analyste n'a rien vécu ni refoulé ; quelle est donc  sa tâche ? Il faut que, d'après les indices échappés à l'oubli, il devine ou plus précisément il construise ce qui a été oublié. La façon et le moment de  communiquer ces constructions à l'analysé, l'explication dont l'analyste les accompagne, c'est là ce qui constitue la liaison entre les deux parties du travail analytique, celle de l'analyste, et celle de l'analysé ».
Plus loin dans son texte, Freud précise où se situe la différence entre la construction et l'interprétation.
« Le terme d'interprétation se rapporte à la façon dont on s'occupe d'un élément isolé du matériel, une idée incidente, un acte manqué etc.. Mais on peut parler de construction quand on présente à l'analysé une période oubliée de sa préhistoire, par exemple en ces termes :  "Jusqu'à votre énième année vous vous êtes considéré comme le possesseur unique de votre mère. A ce moment là un deuxième enfant est arrivé et avec lui une forte déception. Votre mère vous a quitté quelques temps et même après, elle ne s'est plus consacré à vous exclusivement. Vos sentiments envers elle sont devenus ambivalents. Votre père a acquis depuis une nouvelle signification pour vous. ..."(2) Est-ce que nous ne voyons pas apparaître là une élégante mise en perspective de toute la structure d'une névrose? Elle se dessine autour de cette rencontre décisive du désir de la mère, dans une confrontation avec un objet rival qui occupe cette place convoitée d'objet du désir de l'Autre. Normalement le père, c'est sa fonction, est là pour débusquer l'enfant de cette place d'objet métonymique de la mère. De par l'interdit de l'inceste il ne pourra plus être l'unique possesseur mais surtout, si on peut dire, l'unique possédé de sa mère. Dans la névrose, ce désir d'être désiré est en partie maintenu. Il doit devenir interdit,  par tout ce qui se met en jeu dans l'analyse,  autour du désir du psychanalyste en tant que tel.
N'est-ce pas aussi ce que Freud commence à faire avec Ernst, dans le journal de cette analyse,  lorsqu'il reconstruit pour lui, les sources oedipiennes de sa haine du père et de son désir de sa mort, en relation avec ses  désirs sensuels pour les gouvernantes, substituts de  sa mère ? 
Quand on considère l'ensemble de son oeuvre, il est remarquable que Freud a somme toute peu écrit sur la pratique de la psychanalyse, hormis les textes des années 1910 à 1915 qui sont souvent axés sur des conseils pratiques donnés aux jeunes analystes et sur les grands principes de la technique psychanalytique. Dans les toutes dernières années de sa vie, Freud va revenir sur ce sujet dans Constructions en analyse, publié en 1937, et dans Analyse avec fin et analyse sans fin publié aussi la même années.    Dans Constructions en analyse, Freud, fort de sa longue expérience de la pratique psychanalytique, revient sur une question fondamentale qui a trait à la place de la réalité dans le matériel élaboré dans le cours d'une analyse. Dit autrement, et d'une manière plus moderne, la psychanalyse constitue-t-elle un moyen de déterrer un passé enfoui depuis longtemps (comme Freud le croyait à ses débuts) ou une façon de mettre en pensée, en mots, un vécu jusqu'alors ignoré grâce à la construction d'une sorte de mythe individuel dont le rapport historique à la réalité n'est pas la vertu première?
   La question abordée par Freud est cruciale et mérite beaucoup de réflexion, d'autant plus qu'elle tend à nous ramener au débat faisant rage aux États-Unis sur la question des faux souvenirs.
   Un texte d'une grande importance.
Référence: En général, nous conseillons au lecteur de se référer à l'édition française des oeuvres psychanalytiques complètes de Freud qui constitue la traduction la plus récente de ce texte. Les textes étant présentés par ordre chronologique, il sera facile de le trouver s'il est dans un des volumes déjà parus. Ce texte se trouve aussi dans une autre édition dans le livre Résultats, idées, problèmes tome 2 publié aux Presses Universitaires de France dans la collection Psychanalyse.