lundi 3 janvier 2011

Songe de Beuves de Commarchis




Songe de Beuves de Commarchis
Attaqué par des chiens et un lion
Laisse XCIV
Beuves est dans la salle la plus haute du palais.
Un peu avant l’arrivée du jour, [pendant qu’] il dormait profondément,
Il fit un songe qui le remplit de peur.
[Il songe] qu’il chassait avec ardeur un sanglier dans un bois,
Quand plus de quinze féroces chiens de chasse arrivèrent à l’improviste.
Ils lui enlevèrent sa proie, et cela le fait souffrir.
Il empoigne son épée à la lame couverte d’arabesques, il frappe les chiens sur-le-champ.
Il aurait tué cruellement tous ces chiens
Quand apparut un lion qui, sur lui, saute impétueusement.
Il le prend par le bras droit, [et] il le tire et l’allonge,
De telle façon qu’il l’arrache presque du corps.
Beuves est effrayé, et il se lève.
Beuves au noble corps s’éveille si brusquement
Que les chevilles du lit se brisent et celui-ci s’effondre.
Le duc appelle ses gens à haute voix.
Ses chambellans arrivent vite et sans tarder.
« Qu’avez-vous, Seigneur? », demandent-ils. – « Je vous le dirai en quelques mots.
Je viens de faire un songe qui m’effraya beaucoup.
Faites venir ici ensemble Girart et Guion
[Et aussi] mon chapelain Didier, qui est si savant.
Il expliquera tout de suite mon songe. »
– « Seigneur duc », lui répondent ses serviteurs, « vous parlez en vain.
Ils sont partis furtivement vers les tentes des Sarrasins,
Afin de voir Malatrie, la belle au corps charmant.
– « Mon Dieu », dit le duc, « quelle sale tromperie.
Jamais ils ne nouèrent une rencontre amoureuse aussi malheureuse.
J’ai perdu mes enfants, j’en suis sûr. »
Il sortit du lit tout de suite.
On lui apporte ses armes, il saisit celles-ci immédiatement.
Après, il prit son cor en ivoire, [et] il en sonna fortement.
Ses hommes, en l’entendant, accourent tout de suite,
[Et] très courtoisement ils demandent :
« Qu’est-ce que vous avez, Seigneur duc? Dites-nous votre désir?
« À peu », dit le comte, « que le cœur ne me fond.
J’ai perdu mes enfants, si Dieu ne me les restitue pas.
Sortons tous de la ville sans aucun délai.
Au nom de Dieu omnipotent, rendez-moi mes enfants
Que, dehors, les Sarrasins ignobles attaquent. »
Et ils répondirent : « À vos ordres! »
[Et] par la porte principale ils sortent rapidement.

1200AnonymeLe siège de Barbastre

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