lundi 3 janvier 2011

Gerbert rêve d’un faucon



Gerbert rêve d’un faucon
Une bataille en vue
Je vais vous raconter un songe que j’ai fait alors que nous dormions : nous étions à Paris, sur un grand pont, et je me battais contre deux lions. Je les tuais, moi tout seul. Sur mon poing se posait un faucon, qui s’était échappé de la cage de Fromont. Je le nourrissais avec l’aile d’un plongeon. L’oiseau était de mauvaise extraction : il s’envolait en haut vers le ciel. Il s’en fallut de peu qu’il ne prît les deux yeux de mon front.
Gerin répondit : Voilà une noble vision. Comme un clerc, j’en dévoilerai le sens. Ce rêve signifie que nous nous battrons. On verra bien comment nous le ferons : nous combattrons nos mortels ennemis.

Anonyme
Gerbert de Mez
France   1190 Genre de texte
Chanson de geste
Contexte
Gerbert, Gerin et Mauvoisin sont en route pour la demeure du roi Monloon. Gerin entonne une chanson, mais est bientôt interrompu par Gerbert, qui lui rappelle qu’ils doivent rester discrets et sur leurs gardes. Il raconte alors un rêve qu’il a eu la nuit précédente. Gerin comprend que le songe de Gerbert signifie qu’ils auront bientôt à se battre. En effet, ils rencontrent leur ennemi Fromondin accompagné de ses gens peu après le récit du songe. Une bataille s’ensuit.
Notes
Le cycle des Lorrains comporte cinq chansons présentant les aventures de quatre générations de personnages et composées à la fin du XIIe siècle.
Texte original Je voz dirai .i. moi avison
Que je sonjai, cant noz noz domïon :
Que noz estienz a Paris sor grant pont,
Si combatoie toz sez a .ii. lïons.
Ges ocioie, n’i feroit se moi non.
Desour mon poing s’aseoit .i. faucons;
Eschapez ert de la mue Fromont.
Je le paissoie de l’ale d’un plunjon.
Li oisiax fu de male estracïon.
Il s’en voloit vers le ciel contremont;
A poi ne prist les .ii. ex de mon front. »
Et dist Gerins : « Ci a gente avison.
Je serai clers, s’espondrai la leçon.
Ce senefie que noz noz conbatron.
Or i para conment noz le feron.
Nos anemis mortez enconteron.


Deuxième rêve de Gerbert
Son faucon a pris un cygne
Gerbert était à l’hôtel, où il dormait un peu. Il fit un songe, après quoi il s’éveilla. Il appela le bon et vaillant Gerin. « Par les saints de Dieu, j’ai songé ceci à l’instant : nous étions vous et moi à Paris, de même que le vieux Fromont et son fils Fromondin. Mon faucon avait pris un cygne : je le faisais envoyer à mon seigneur Anseïs. Expliquez m’en le sens, par Dieu, seigneur cousin! »
— Volontiers, certes, lui dit Gerin, cela signifie que vous recouvrerez Fleuri.

Anonyme
Gerbert de Mez
France   1190 Genre de texte
Chanson de geste
Contexte
Gerbert a tué le roi Charboncle et s’est emparé de Fleuri, un cheval des plus prisés. Cependant, le roi Anseïs, sur les terres duquel Gerbert a vaincu Charboncle, réclame le cheval au vainqueur. Gerbert, indigné, refuse de se départir de la bête. Le roi la fait donc enlever. La reine parvient à convaincre son époux de restituer Fleuri à Gerbert. Gerber fait un rêve et en déduit correctement qu’on lui rendra son cheval.
Texte original A l’ostel ert, ou dormoit .i. petit.
Sonja .i. songe, et aprés s’esperi,
Si apella le bon vassal Gerin :
« Par les sains Diu, je sonjai ore ci,
Que moi et voz estïons a Paris,
Li viex Fromons et ses fiz Fromondins.
A mon faucon avoie .i. cine pris,
Sel trametoie mon signor, Anseïs.
Metez la bien, por Diu, sire cousins! »
- Volentiers, certes, » ce li a dit Gerins,
« Ce senefie que voz ravrez Flori. »

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