lundi 17 janvier 2011

Le rêve de Madeleine



 
La mystérieuse maladie

Les délicats malaises, éprouvés la veille, se révélaient maintenant dans son sommeil, comme d’irrévocables signes d’une maladie dont elle était soudain atteinte. Le fin nuage qui avait effleuré ses tempes, hier, était cette nuit l’étau de plomb qui emprisonnait sa tête entière, elle respirait avec peine, les battements de son coeur étaient irréguliers et lourds, et mystérieusement transportée d’une chambre d’hôpital à une autre par de silencieux ennemis qui caressaient son front au passage, l’entourant de visages que tous ne semblaient pouvoir offrir que le blanc sourire de la terreur, lorsqu’ils se tournaient vers elle. Émergeant du brouillard, elle dit avoir pensé : « Est-ce possible, Mon Dieu, est-ce possible que je me trouve ici? » Très simplement, je lui donnai une explication de ce rêve.
— Tu crains une tumeur, lui dis-je.
Elle s’offensa :
— Rodolphe, tu crois pouvoir tout expliquer avec des mots, mais tu ne comprends pas, tu ne comprends jamais.
Elle avait raison.

Marie-Claire Blais
L’Insoumise
Québec   1966 Genre de texte
roman
Contexte
Ce récit de rêve se trouve au début de la deuxième partie du roman. Madeleine raconte à son mari Rodolphe qui est médecin l’un de ses cauchemars. Leur fils aîné, Paul, vient de mourir dans un accident de ski et ils tentent de mieux le comprendre comme de mieux se comprendre entre époux.
Édition originale
L'insoumise, Montréal, Les Éditions du Jour, 1966, p. 69-70.

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