Les apnées du sommeil existent aussi chez l'enfant, même si elles sont souvent méconnues. Elles peuvent être liées à un trouble nasal, mais aussi à la morphologie du palais. A l'occasion des 13èmes Journées de l'Orthodontie qui ont eu lieu à Paris du 5 au 8 novembre, les spécialistes de la Fédération sont revenus sur l'influence primordiale de la morphologie bucco-dentaire sur la ventilation et les moyens existants de correction.
Un enfant qui a du mal à se réveiller, fait des cauchemars ou ronfle a peut-être un problème d'orthodontie auquel ses parents n'ont pas forcément pensé. Le point sur une anomalie dont la correction, relativement aisée et rapide, donne souvent des résultats très positifs.Comment soupçonner une apnée du sommeil chez un enfant ?
Lors des 13èmes journées d'orthodontie, qui ont réunit 3000 spécialistes, le Dr Jean-Baptiste Kerbrat a rappelé l'importance de l'inscription de l'orthodontie dans la santé, en particulier respiratoire.Ce spécialiste est revenu notamment sur les apnées de sommeil de l'enfant, "épisodes de ronflements intenses avec des phases d'arrêts respiratoires, entraînant une réduction de l'oxygénation sanguine", caractérisées par une respiration par la bouche (et non par le nez).
Un enfant qui présente des apnées du sommeil va mal dormir, ronfler, s'agiter, faire des cauchemars, baver (signe qu'il respire par la bouche) sur sa couette qui sera retrouvée en vrac le matin, s'endormir ou somnoler pendant la journée. Il va également transpirer en dormant. En voiture, il va dormir la tête en arrière, en hyperextension, la bouche ouverte.
Résultat, son sommeil n'est pas réparateur (absence de sommeil profond). Il a du mal à se réveiller, il est ensuite hyperactif, désagréable et connaîtra des troubles scolaires si la cause de ses apnées n'est pas levée.
Si les parents ou un professionnel de santé repèrent ces troubles, un examen va permettre de confirmer le diagnostic avant une prise en charge thérapeutique adaptée à la cause.
Comment confirmer le diagnostic ?
Le diagnostic d'apnées du sommeil de l'enfant peut être confirmé grâce à la réalisation d'un enregistrement nocturne via de nombreux capteurs : c'est ce que l'on appelle la polysomnographie, qui doit se réaliser en milieu hospitalier spécialisé ("centre du sommeil"), ce qui est relativement contraignant.C'est pourquoi le Dr Kerbrat souligne qu'il est possible d'utiliser un autre système, plus léger que la polysomnographie : le Jawac (cf.image ci-contre), ou polygraphie ventilatoire, qui ne comporte que 5 capteurs et peut se réaliser au domicile, sans assistance médicale. Le Jawac, malheureusement non encore reconnu par la Sécurité Sociale (donc non remboursé…), permet, tout aussi bien que la polysomnographie, de détecter la position du palais, les mouvements de la bouche et donc la respiration buccale et les passages en apnée.
Le palais étroit est une cause méconnue d'apnées du sommeil
L'obstruction nasale chronique (rhinite allergique, rhumes et rhino-pharyngitesà répétition, déviation de la cloison nasale, etc.) est la cause la plus évidente de ces apnées. Elle devra donc être levée par un traitement adapté.Un autre facteur prédisposant, moins bien connu du grand public, est l'étroitesse du palais : l'enfant a alors la bouche entrouverte, sa langue descend et ne joue plus son rôle sur la formation du palais. Il se constitue donc un cercle vicieux qui entretient cette étroitesse.
Or le palais commence au niveau des fosses nasales : si les orifices sont rétrécis par l'étroitesse du palais, l'air va mal passer et l'enfant va alors respirer par la bouche au lieu du nez, ce qui l'expose à des troubles du sommeil avec éventuellement des apnées, présentes dans un tiers des cas selon une étude présentée aux 13èmes Journées de l'Orthodontie.
Comment corriger un palais étroit ?
Une fois le diagnostic posé, il est possible de corriger mécaniquement cette étroitesse du palais, du moins chez l'enfant.Pour cela, l'orthodontiste va poser deux bagues sur les grosses molaires, reliées par un vérin. Il suffit alors de tourner progressivement ce vérin, ce qui va écarter les deux moitiés du palais.
Les orifices nasaux vont alors très rapidement se dégager. Le spécialiste prescrit simultanément des exercices de rééducation, afin que l'enfant puisse s'habituer à respirer par le nez (exercices en fermant la bouche). Cette rééducation doit être débutée rapidement, car sinon l'enfant continue à respirer par la bouche, ce qui va faire s'épaissir ses muqueuses et ré-encombrer ses voies respiratoires.
Selon le Dr Kerbrat, ce traitement, qui n'est pas efficace à 100 %, permet tout de même, en peu de temps, de souvent corriger ces troubles respiratoires qui empoisonnent la vie des enfants concernés.
Cependant les deux moitiés du palais sont complètement soudées au moment de la puberté, il vaut donc mieux intervenir bien avant, vers 6 ou 7 ans. Certes, après la puberté ou à l'âge adulte, il est toujours possible de corriger un palais étroit, mais chirurgicalement seulement, ce qui est beaucoup plus pesant.
Il est donc capital de diagnostiquer rapidement ces troubles, afin de proposer ce traitement peu douloureux, facile à mettre en œuvre et rapide (quelques semaines maximum) et d'éviter une "perte de chances pour un enfant" liée à l'impact des troubles du sommeil sur sa vie quotidienne (école, mais aussi colonies, vacances, loisirs, etc.).
Si vous soupçonnez de tels troubles chez votre enfant, n'hésitez pas à en parler à son dentiste ou son médecin traitant !
Dr Jean-Philippe Rivière, le 9 novembre 2010
Source : 13èmes Journées de l'Orthodontie, table ronde ouverte à la presse avec les docteurs Edith Lejoyeux, Claude Bourdillat, Jean-Baptiste Kerbrat, Yves Trin et Olivier Mauchamp, Paris, 8 novembre 2010
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