Les troubles du sommeil liés au vieillissement sont incontournables et leurs répercussions augmentent avec l'âge. Pourtant, l'application de certaines règles simples permet souvent de retrouver ou de maintenir un sommeil de qualité acceptable. Lorsque ces mesures comportementales ne suffisent plus, il revient au médecin de famille de faire le point sur la situation, de rechercher certaines pathologies connues pour perturber le sommeil et si besoin est de mettre en place un traitement médicamenteux spécifique et adapté.
Dans un premier temps, il faut comprendre l'origine du problème
L'insomnie est transitoire … En cas de perturbations transitoires du sommeil, le praticien cherche à mettre en évidence un changement de mode de vie (séjour à l'étranger, voyage transméridien, hospitalisation, intervention chirurgicale), un bouleversement brutal de l'environnement affectif (stress, deuil) ou une modification de l'environnement physique (séjour en altitude, chaleur excessive, bruits de voisinage). Ces insomnies passagères n'impliquent généralement aucun bilan complémentaire.
… ou chronique Lorsque l'insomnie devient chronique (supérieure à 3 mois), le médecin tente de dépister certaines affections organiques pouvant retentir sur le sommeil (affections douloureuses, rhumatismes, troubles urinaires, insuffisance respiratoire, etc.). Il considérera également certains facteurs psychologiques (dépression, accès maniaque, état délirant, etc.). Tenir un agenda du sommeil (souvent établi avec l'aide du conjoint) permet par exemple de distinguer les insomnies d'endormissement (fréquentes en cas d'anxiété), les réveils précoces (touchant plutôt les sujets déprimés) et les éveils à répétition au cours du cycle (lors des apnées du sommeil ou de douleurs). Si les affections physiques ou psychiques sont variées et augmentent avec l'âge, il existe chez le sujet âgé trois grands syndromes fréquemment rencontrés.
- Le syndrome des jambes sans repos (ou impatience des membres inférieurs)
Au moment de l'endormissement ou lors d'éveils durant la nuit, les membres inférieurs se contractent de façon involontaire et interfèrent sur la qualité du sommeil. Pour diminuer cette tension douloureuse, la personne est obligée de se lever pour faire quelques pas. La fatigue au réveil en est souvent importante. Une fois suspecté, le diagnostic est confirmé par un enregistrement polysomnographique. Malheureusement, il n'existe aucun traitement efficace de la cause, mais certains médicaments peuvent diminuer les réveils associés aux mouvements des jambes. Avant toute chose, il faut éviter de prendre de la caféine ou certains médicaments comme des antidépresseurs ou des antihistaminiques.
Les apnées du sommeil
Elles sont caractérisées par l'arrêt du flux d'air au niveau des voies aériennes supérieures pendant au moins dix secondes au cours du sommeil. La répétition et la durée des apnées fragmentent le sommeil, entraînant une somnolence diurne excessive et un risque reconnu de pathologies cardiovasculaires (trouble du rythme, hypertension artérielle, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral). Le diagnostic est suspecté lors de ronflements entrecoupés de pauses respiratoires, confirmé par l'enregistrement du sommeil. La prise en charge de ce syndrome consiste à perdre du poids en cas de surcharge pondérale, à éviter les sédatifs (benzodiazépines et opiacés aggravent l'apnée) et en cas de forme sévère à porter un appareil de pression positive continue pendant la nuit.
- L'insomnie liée au syndrome démentiel
Il existe un lien entre l'état démentiel et les perturbations du sommeil. En effet, en association avec troubles cérébraux, les phases du sommeil lent et paradoxal diminuent, les éveils nocturnes se multiplient et l'alternance veille/sommeil finit par s'inverser. Ces dérèglements représentent un véritable problème car des épisodes prolongés de veille pendant la nuit sont souvent à l'origine d'un placement en institution. La réduction du temps de sieste, le recul du coucher et l'exposition à la lumière vive pendant la journée peuvent apporter un réel bénéfice. Certains suggèrent un traitement par la mélatonine dans le but de resynchroniser le rythme veille/sommeil.
Le deuxième temps est celui du choix du traitement
Le praticien aura toujours à l'esprit l'âge et les antécédents personnels de son patient pour choisir et adapter un traitement « sur mesure », de façon à limiter le plus possible les effets secondaires fréquents et délétères chez les seniors.
- Les sédatifs hypnotiques : " le marchand de sable "
Cette famille médicamenteuse est souvent utilisée en cas de troubles du sommeil passagers mais invalidants car se faisant ressentir sur les activités de la vie quotidienne (deuil, hospitalisation). Idéalement, les hypnotiques induisent le sommeil sans entraîner de somnolence durant la journée. Ils ne sont pas responsables de dépendance et leur efficacité ne varie pas. Cependant, ils ont une action courte, majeure en début de nuit, et n'agissent que très peu sur le maintien du sommeil. Au mieux, ces substances doivent être administrées en cure discontinue de 2 à 3 semaines, la dose minimale étant toujours recherchée
Les benzodiazépines : " les faux amis de longue date, dont on a du mal à se défaire "
Cette famille est encore l'une des plus prescrite. Ces agents sédatifs, « calment », mais n'induisent pas immédiatement le sommeil. Par ailleurs, souvent incontournable, la dépendance qu'ils entraînent représente l'ennemi absolu de ces médicaments. Pour limiter ce phénomène, il faut éviter leur utilisation prolongée car celle-ci conduit inévitablement à l'accoutumance, nécessitant alors l'augmentation des doses. Souvent, les personnes vieillissent avec leur somnifère. Mais un médicament utile à l'âge adulte, gardé par habitude durant 30 ou 40 ans, peut être responsable de bon nombre de catastrophes ; l'organisme âgé n'élimine plus aussi bien les principes actifs et des somnolences apparaissent régulièrement pendant la journée, des états léthargiques, des troubles importants de la mémoire, des chutes avec fracture de hanche, etc. Il importe au médecin et à son patient de remettre régulièrement en question les indications de ce type de traitement.
- Les antidépresseurs
Dans le cadre de certains troubles du sommeil accompagnant le syndrome dépressif, il est possible d'utiliser certains antidépresseurs. La condition est de choisir les molécules ayant le moins d'effets secondaires. Après plusieurs semaines seulement, on peut espérer un effet bénéfique sur les réveils précoces.
Les antihistaminiques sédatifs : " attention aux molécules cachées "
Beaucoup de praticiens ne les recommandent pas chez le sujet âgé. Ils provoquent notamment une accoutumance lors de leur utilisation prolongée. Malheureusement, bon nombre de sédatifs vendus sans ordonnance en pharmacie en contiennent ; il faut y penser !
Mal dormir, c'est vivre moins bien. Mais mieux vivre apporte un sommeil de meilleure qualité … Quand une meilleure hygiène de vie ne suffit plus à gérer les problèmes de sommeil, il ne faut en aucun cas céder à la tentation de suivre les recommandations d'une tierce personne ou de faire de l'automédication, notamment en augmentant la posologie afin d'enrayer les effets de l'accoutumance. Seul le médecin est compétent pour choisir le « bon » médicament, car il en connaît les modes d'actions, les effets indésirables et les contre-indications.
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