Plusieurs études conduites en laboratoire ont montré que des stimuli sensoriels présentés pendant le sommeil paradoxal peuvent influencer le contenu des rêves. Une lampe clignotante rayonnant directement au-dessus du donneur et un stimuli auditif sont incorporés au rêve dans respectivement 23 % et 29 % des cas. La lumière était associée à des rêves où apparaissaient éclairs ou étoiles filantes. Suite à la présentation d'un son très fort, un rêveur a rêvé qu'un avion s'écrasait à l'extérieur de sa maison. Une autre étude a démontré que les stimuli olfactifs extérieurs sont incorporés dans approximativement 20 % des rêves.
Il est ainsi clair que des stimuli externes peuvent affecter l'expérience sensorielle pendant les rêves. Mais qu'en est-il de la prévalence des différents sens dans les rêves ordinaires non stimulés? Les rêves sont visuels pour la majorité des personnes voyantes. Mais les personnes qui ont perdu la vue avant l'âge de 5 ans ne " voient " généralement pas leurs rêves. L'imagerie visuelle est variable chez les gens atteints de cécité entre 5 et 7 ans, et elle demeure présente pour les individus devenus aveugles après leur septième année, même si elle s'estompe avec l'âge. Les sons constituent la deuxième modalité sensorielle la plus fréquemment intégrée dans les rêves. Environ 55 % à 60 % des rêves quotidiens contiennent des références explicites aux expériences auditives. Même si de telles expériences peuvent être associées à divers événements, tels que entendre la circulation ou écouter de la musique, les conversations constituent les sources de sons les plus fréquentes dans les rêves. Les rêves des malentendants congénitaux contiennent des couleurs vives et des couleurs primaires particulièrement hautes en saturation et en intensité. Ceci suggère qu'une privation précoce d'une modalité sensorielle (ouïe) peut accroître la fréquence d'une autre modalité sensorielle (vue).
Un rêve mouillé Le héros de bande dessinée Little Nemo, créé par Winsor McCay en 1905, expérimente le fait qu'un stimulus extérieur peut être intégré au rêve. En 1958, les études réalisées par William Dement et Ed Wolpert montreront qu'un fin jet d'eau froide appliqué sur la tête d'un dormeur est incorporé au rêve dans 42 % des cas (le plus souvent sous la forme d'une averse). |
Les rêves contenant des odeurs apparaissent dans environ 1 % des rapports de rêves et se retrouvent le plus souvent chez les femmes. Les odeurs expérimentées dans les rêves peuvent être extrêmement déplaisantes (vomissures, ordures) ou très plaisantes (parfums, odeur de pain fraîchement cuit). Les expériences gustatives apparaissent aussi dans environ 1 % des rapports de rêves. Elles font plus souvent référence à la nourriture qu'aux boissons.
Freud pensait que la douleur n'était jamais l'unique cause d'un rêve mais servait plutôt à y incorporer des images oniriques spécifiques. Cependant, une de nos études en laboratoire a montré que les sensations de douleur de tout genre sont mentionnées dans environ 30 % des rêves de sommeil paradoxal recueillis à la suite d'une stimulation de pression de longue durée appliquée à la jambe. D'autres études ont aussi démontré que des rêves de douleur peuvent apparaître pendant les périodes de sommeil paradoxal non stimulées. Ceci indique que les stimuli douloureux ne sont pas nécessaires pour que les expériences de douleur surviennent.
Approximativement 50 % des personnes ont rapporté avoir expérimenté une douleur physique dans leurs rêves à un moment donné de leur vie. Dans une étude menée sur 3 000 rêves racontés par 185 sujets, 18 rêves contenaient des références de douleur physique, souvent intégrées à l'histoire du rêve: avoir mal aux pieds à cause de chaussures inconfortables, coincer sa jambe sous une immense roue, avoir des maux d'estomac dus à une grossesse difficile, etc. Seize de ces dix-huit rêves contenaient exclusivement des affects négatifs, tandis que les deux autres contenaient des émotions négatives et positives. La peur était de loin l'émotion la plus fréquemment citée, suivie de la confusion, de la frustration et de la colère. Les résultats des diverses études suggèrent que les systèmes cognitifs qui contribuent à la représentation de la douleur pourraient être fonctionnels pendant les rêves. Le cerveau est donc capable de générer une multitude d'expériences sensorielles oniriques, autres que celles faisant appel à la vision.
Antonio Zadra,
Psychologue à l'hôpital du Sacré-Coeur de Montréal
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