Sous l'appellation "Stage de sommeil" se cache une idée bien réelle: il est possible de réapprendre à bien dormir, même à l'âge de la retraite. Cette expérience a débuté en 1991 au sein du Centre régional de prévention santé situé à Lyon et se poursuit à ce jour. Ce centre accueille des retraités des Caisses de cadres de la région Rhône-Alpes et met en place, depuis 1987, tout un programme d'information et de prévention de la santé en général et du sommeil en particulier. Dans ce domaine, de nombreuses actions ont déjà été et sont encore menées de façon ponctuelle, mais le Centre de prévention s'est donné les moyens d'une action à plus long terme en organisant ces stages animés conjointement par des spécialistes du sommeil et des professionnels des techniques de relaxation. Le but du stage est essentiellement une dédramatisation du trouble et un apprentissage de l'autogestion de son sommeil. L'insomnie, qui regroupe diverses perturbations de la durée ou de la qualité du sommeil, est une plainte d'un sommeil insuffisant ou insatisfaisant. Les causes en sont souvent multiples. La classification internationale des troubles du sommeil distingue différentes formes d'insomnie en fonction de leurs causes et des affections neurologiques ou psychiatriques s'y rattachant. Aucun entretien préliminaire n'étant réalisé avant les stages toutes les personnes qui le souhaitent sont accueillies. Les groupes sont ainsi constitués d'un éventail de personnes présentant tous les aspects de l'insomnie. Cependant, ces stages visent plus particulièrement les personnes atteintes d'insomnie psychophysiologique, car ce sont elles qui vont en retirer le plus grand bénéfice. Mais le travail est celui d'un groupe les problèmes des uns permettant aux autres de reconsidérer leur "histoire". DÉROULEMENT DES SÉANCESCes stages se déroulent sur cinq semaines, à raison de deux heures par semaine. Le nombre de participants est limité à huit personnes pour permettre un approfondissement des problèmes de chacun. Un neuropsychiatre, un spécialiste du sommeil et deux professionnels des techniques de relaxation animent conjointement ou à tour de rôle les séances.La première séance est consacrée à l'exposé par chacun de ses difficultés de sommeil. Une première approche des causes possibles à l'origine du trouble est discutée. Tout particulièrement les événements, les circonstances et le climat psychologique présidant à la survenue des troubles sont notés. Les troubles remontent en général à plusieurs années (vingt ou trente ans) et l'origine n'est pas toujours clairement exprimée. L'accent est mis sur la nécessité de réfléchir sur cette origine pour que, connaissant la cause, on puisse agir de façon plus efficace. Une présentation de l'agenda de sommeil est ensuite faite. C'est une grille sur laquelle les participants vont noter, pendant trois semaines leurs horaires de lever et de coucher, la durée de leur sommeil et de leurs éveils pendant la nuit, la durée des siestes. Sont aussi notés, pour évaluer leur vigilance diurne, les bâillements et les endormissements involontaires, ainsi que les traitements médicamenteux et les médicaments pour dormir. Une grande colonne "agenda" permet d'inscrire en regard de chaque jour, les événements susceptibles d'intervenir sur la qualité du sommeil (voyage, "soirée arrosée", bonnes et mauvaises nouvelles, activités diverses,etc...) Remplir cette grille permet une première prise de conscience de l'organisation de la journée dans son versant diurne et nocturne. Cette prise de conscience est renforcée par l'idée énoncée dès le début de séance "ce stage s'appelle stage de sommeil mais nous allons beaucoup parler de l'éveil" . La réponse pour chacun à un questionnaire de 38 items clôt cette première séance. La physiologie du sommeil est abordée en deuxième séance. Le déroulement d'une nuit normale de sommeil est étudié à travers une analyse particulière de tous ses temps faibles : l'endormissement, le réveil, la deuxième partie de la nuit. La physiologie permet de comprendre la fragilité des périodes de transition dans le sommeil et met en évidence la notion de non-stabilité et de non-continuité dans le déroulement du sommeil. Les temps de transition éveil sommeil sont ensuite vécus lors d'une séance de relaxation-réveil. Lors de la troisième séance, l'agenda de sommeil de chacun des participants est analysé . C'est un moment important ou bien souvent de nouveaux aspects non évoqués jusqu'ici apparaissent. Les participants se connaissent mieux et la position des intervenants lors de cette séance est un peu en retrait à l'écoute des échanges multiples. Les divers problèmes de la vie quotidienne familiale, professionnelle maternelle et affective présente et passée sont souvent évoqués. Un débat sur l'anxiété accompagné d'un travail sur le vécu de ce problème est organisé lors de la quatrième séance. Les mécanismes de l'anxiété sont abordés à travers des mots clefs comme la peur, l'anticipation, la notion de contrôle, les tensions, l'hypervigilance. Ce débat reste très ouvert et chacun s'exprime librement en rapportant ses expériences. Une nouvelle séance de relaxation, plus orientée vers l'endormissement, fait suite à la discussion. La dernière séance est consacrée aux traitements au sens très large du terme. Ce stage n'a pas de but thérapeutique précis ; cependant, les désirs d'arrêt de prise de somnifères sont discutés. La nécessité pour certains de poursuivre leur traitement est aussi dédramatisée et déculpabilisée. Le débat est ensuite élargi en direction d'une vision plus globale de la santé. Des notions en apparence simples et évidentes comme l'équilibre corps-esprit sont mises en avant pour permettre une prise de conscience plus aiguë du rôle de chacun dans le maintien ou la redécouverte d'un équilibre de la santé et par la même du sommeil. Le rôle très important de la créativité au sens large du terme, c'est-à-dire qu'une action dans laquelle nous sommes complètement impliqués et procurant du plaisir est discuté. La prise de conscience pour chacun, de la mise en oeuvre de façon plus ou moins inconsciente de stratégies allant dans ce sens constitue un moment fort. Cela permet d'entrevoir la multitude des actions offertes pour agir et réagir dans le sens d'un meilleur équilibre de la santé et du sommeil. BILANLes effets du stage sont "mesurés" à partir de questionnaires reprenant une partie des items concernant directement les durées et l'organisation du sommeil. Ces questionnaires sont remplis immédiatement après le stage et analysés; puis six à huit mois après, lors d'une séance de réactualisation. Avant cette séance, un nouvel agenda est rempli permettant une comparaison plus objective des effets à long terme. Les améliorations sont immédiates et portent essentiellement sur un meilleur vécu et une dédramatisation des troubles. Les difficultés d'endormissement sont assez facilement jugulées et les éveils nocturnes, s'ils persistent ont une durée réduite. La répercussion du stage est surtout évidente sur la qualité des journées et de l'éveil. La somnolence diurne chute beaucoup, de même que la fatigue au réveil. Presque tous les participants se disent prêts à changer quelque chose dans leur vie et à arrêter à plus ou moins long terme tout traitement pour dormir. Six à huit mois après, les améliorations lorsqu'elles ont été vraiment marquantes se poursuivent et pour certains l'insomnie a disparu, pour d'autres les choses se sont stabilisées : le sommeil s'est amélioré, mais il existe toujours une insomnie, vécue maintenant de façon positive. Peu d'aggravations ont été notées. Lorsqu'elles existaient elles étaient dues essentiellement à des perturbations personnelles. La relaxation a été très bien vécue et souvent reprise à un niveau personnel par un grand nombre de participants. Les améliorations, et surtout le meilleur vécu de leurs troubles sont essentiellement dus à une meilleure compréhension de la physiologie du sommeil, ce qui ne fait que confirmer le rôle de l'information dans toute action de prévention. L'effet "dynamique de groupe" est incontestable. Les expériences, le vécu, les émotions partagées, ont souvent servi de catalyseur permettant une verbalisation des traumatismes passés à l'origine du trouble. Cette action a ainsi permis de mettre au jour dans au moins 90 % des cas cette origine. Cela a été principalement efficace dans le cas de troubles anciens, mal gérés depuis longtemps et vécus comme une fatalité.CONCLUSIONCes stages de sommeil correspondent à l'attente des différents participants, qui tous regrettent de ne pas avoir été informés plus tôt. Ce regret est même parfois amer, car ils ont le sentiment d'avoir gâché une partie de leur vie alors que le remède leur paraît soudain très simple. Une telle formule devrait pouvoir être élargie en direction de groupes plus jeunes. Cependant la prise en charge d'une telle organisation demande un investissement parfois difficile de la part des différents organismes de prévention.
| |||||||
|
Chacun de nos rêves est le reflet de notre âme. Mohamed Chéguenni
mardi 28 décembre 2010
Une action efficace contre l'insomnie : les stages de sommeil
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire