dimanche 9 janvier 2011

Coma et rêve



On sait qu’un certain nombre de comateux produisent, au sortir de leur coma, le texte d’un rêve - ou de ce qu’ils appellent un rêve. C’est un point qui mérite réflexion. (cf.Plum et Posner : la page 11 est particulièrement éclairante si l’on considère que le rêve ne manque pas lorsque le sommeil est en phase paradoxale.) J’ai fait l’hypothèse, dans ma thèse (Balat 1986), qu’en phase paradoxale la mise hors circuit d’une partie du corps pouvait induire des phénomènes psychiques involutifs (de type métaphorique), si caractéristiques de la pensée vigile, mais qu’en phase lente le tissu continu du "penser" n’est pas pour autant aboli, puisque le réveil dans cette phase amène la production de vagues souvenirs ponctuels et non, comme dans le cas du réveil en phase paradoxale, à de véritables tableaux-rébus (cf. aussi Dement 1981).
Le problème du rêve : considérations sémiotiques
Bien entendu se pose ici une question théorique importante : comment faire l’hypothèse que "le tissu du ’penser’ n’est pas aboli" sans aucun témoignage qui puisse faire valoir cette hypothèse ? En effet rien ne prouve que l’on puisse la vérifier expérimentalement. Toutefois si l’on fait l’hypothèse contraire, il semble que l’on se trouve rapidement soumis à des difficultés bien plus grandes. Tout d’abord qu’est-ce que le "penser" ? Pour les sémioticiens, la pensée et le penser sont par essence des signes. La distinction que l’on peut faire entre la pensée et le penser est, toujours d’un point de vue sémiotique, une question de faits. Logiquement, la pensée ne nécessite pas, puisqu’elle est liée aux faits, qu’un penser actuel la fasse être, elle est latente dans le fait, sous la forme d’un "peut être" et d’un "serait", c’est-à-dire de ce que nous appelons une "habitude". Car la forme essentielle même de la pensée est qu’elle déterminerait une habitude de pensée. Ainsi, le souvenir d’un rêve est en lui-même une habitude suffisamment remarquable pour que l’on se penche sur la nature de ce qui a produit cette habitude. Ce ne peut être qu’un signe (ou un ensemble de signes).

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