jeudi 13 janvier 2011

Rêve et sciences occultes



Le rêve, nous dit la Science, est une combinaison involontaire d’images ou d’idéee, souvent confuses, parfois très nettes et très suivies, qui se présentent à l’esprit pendant le sommeil.
A l’état normal, on ne rêve que rarement pendant les premières heures du sommeil. Mais plus tard, à mesure que les organes de la pensée se délassent, ils rentrent, successivement à l’état de veille ou d’activité ; c’est pourquoi on rêve davantage lorsque s’approche l’heure du lever. Le rêve n’est donc qu’un état de veille partielle de quelques organes cérébraux avec ou sans celle des appareils extérieurs correspendants ; ou, en d’autres termes, il est une activité spontanée de certains organes pendant que les autres reposent.
Les rêves sont le produit d’un travail cérébral non réglé par l’examen de la réalité à l’aide des organes des sens. Si, le plus souvent, les rêves sont bizarres, c’est que le sommeil ayant fait cesser toute spontanéité, les diverses idées qui sont formées, sont associées comme au hasard et, par conséquent, avec d’étranges incohérences.
Souvent les rêves ont, par leur nature, quelques rapports avec la cause qui oblige le cerveau à les engendrer. Le plus souvent le cerveau est seul mis en jeu dans une ou plusieurs de ses parties ; mais il peut arriver que les rêves s’accompagnent de tous les phénomènes expressifs ainsi qu’à l’état de veille absolue : on se meut, on parle, on gémit, on se plaint, on pleure, on chante, etc.
Quelquefois, pendant le sommeil, se produisent de véritables travaux intellectuels que la volonté semble diriger. Il n’est personne qui, en dormant, n’ait travaillé les divers objets de ses études. Souvent on résout alors tout d’un coup, avec promptitude, des difficultés de mémoire, de jugement, d’imagination, qu’on n’avait pu vaincre pendant la veille. C’est que le sommeil n’a pas gagné les organes cérébraux de la conception et de la méditation, qui veillent pendant que les autres sont dans le repos.
Ce qui précède est l’expression de la science moderne, par l’organe de M. Littré. Ce n’est que de la physiologie, et les physiologistes n’admettent pas le surnaturel, mais il faut laisser dire aux modernistes tourmentés par le souci des sciences positives que seules sont dignes d’intérêt, les doctrines qui d’un bout à l’autre peuvent être traitées par le syllogisme et par la déduction. Leur esprit, façonné par la trituration particulière aux mélhodes malhémaliques, est incapable de s’élever au-dessus des considérations qui constituent le domaine de l’école utilitaire, et se montre rebelle aux investigations qui procèdent des études naturelles, en ce qu’elles ont de plus immatériel et de plus élevé.
De plus immatériel, il faut insister sur ce point. Actuellement, la matière, en effet, a la prédominance sur l’esprit dans les goûts de l’humanité; et c’est là ce qui fait notre malheur. Aux recherches mystiques où se plaisait l’antiquité on a substitué les recherches positives propres à être mises en équation et traitées comme autant de problèmes d’algèbre.
El quels ont été les résultats de celte tendance ? C’est qu’au lieu de s’élever et de s’élargir, l’Ame, qui est l’unité vitale, s’est rabaissée est diminuée; c’est qu’au lieu d’entretenir des aspirations saines et consolantes, la généralité des hommes est tombée dans les croyances étroites d’où naît la désespérance, c’est-à-dire la diminution de la foi. Le scepticisme est le mal dont souffre le monde, et c’est à nos philosophes et à nos savants modernes que nous devons nous en prendre de celle plaie qui s’est attachée aux générations actuelles et les ronge.
Ne pas croire, à peine est-ce tolérable chez ceux-là que l’Age a maintes fois désillusionnés, qui vont, les cheveux blanchis et le corps courbé, n’ayant plus rien à attendre, et passent les jours à se souvenir et à regretter.
Ne pas avoir la foi, c’est inadmissible chez ceux-là que ne tourmente pas un réalisme outré, que la vie n’a pas complètement usés, que Schopenhauer et ses disciples n’ont pas gagné à une prétendue philosophie dont le résultat n’est pas autre chose que la négation du perfectionnement et du progrès..
Bien différents étaient les hommes de l’antiquité et ceux du moyen Age. Tous, sans en excepter les plus éclairés, adoptaient plus ou moins, comme dignes de leur examen, les spéculations où le mystérieux tenait la plus grande place, où la croyance ne pouvait pas s’étayer sur le raisonnement et s’appuyer sur des preuves.
Valaient-ils pourtant moins que nous ne valons?
C’est au moins douteux, pour ne pas dire davantage. Et si le siècle où nous vivons est appelé à marcher dans l’histoire de l’humanité par l’avancement de l’analyse scientifique, il est peu probable qu’il efface les splendeurs de l’antiquité et les merveilles du moyen Age. Victor Hugo, quelle que soit sa gloire, ne fera pas oublier Homère ; Cousin ne fera pas oublier Platon; l’astronomie ne tuera pas l’astrologie; et tous les progrès de la chimie n’enterront pas l’alchimie.
Or, parmi les sciences qui ont le plus occupé nos ancêtres, l’onéiromancie, ou l’art d’expliquer les songes, était particulièrement tenue en honneur. Aristote, Hippocrate, Galion, d’autres encore non moins célèbres, s’en sont occupés ; Pline estime qu’un songe annonce précisément le contraire de ce qu’il fait voir ; c’est ainsi que, d’après lui, rêver que l’on pleure est un présage de joie, et, inversement, rêver que l’on est en joie est un présage de pleurs.
En France, l’art d’expliquer les songes ne commença à être en vogue que vers le commencement du quinzième siècle. Il y fut importé par des bandes errantes qui venaient de la Bohême.
Ces bandes, dit Pasquier, se composaient d’une centaine d’individus, que l’on appelait les Bohémiens. Leur chef avait, parmi eux, le titre de duc, d’autres étaient comtes ou barons.
Ils avaient dix hommes d’escorte et s’annonçaient comme arrivant de la Basse-Egypte d’où les Sarrasins les avaient chassés. Ils, étaient allés à Rome confesser leurs péchés, et le Souverain Pontife leur avait, pour pénitence, enjoint d’errer de par le monde pendant sept années consécutives, sans jamais coucher dans un lit. Ils campèrent au village de la Chapelle Saint-Denis, où les Parisiens allaient les voir en foule. Ils avaient les cheveux crépus, le teint basané, et portaient aux oreilles des anneaux d’argent.
Les personnages les plus célèbres de notre siècle ont cru à l’onéiromancie. Napoléon Ier accorda sa confiance entière à Moreau, l’impératrice Joséphine à Mlle Lenormand, Louis XVIII à Martin; vers 1850, Mme Clément donnait, rue de Tournon, des séances où accourait la société aristocratique de Paris.
C’est surtout des songes que n’a occasionnés aucun état passionnel ou morbide qu’il convient de tenir compte; les songes nés d’une excitation n’ont comme présages qu’une valeur relativement très faible.
Les rêves qui comportent une prophétie réelle sont surtout ceux qui se produisent vers la fin du sommeil, alors que l’esprit, bien reposé, n’est soumis à aucune influence étrangère ; il faut, en tout cas, que le travail de la digestion soit complètement terminé, que le songeur n’ait éprouvé aucune émotion violente et qu’à son réveil il ait gardé le souvenir très net de ses visions.

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