dimanche 31 juillet 2011

Hystérie traumatique


L’hystérie traumatique est une forme d’hystérie décrite par Charcot dont les symptômes surviennent, après un temps de latence, suite à un traumatisme physique. 
La rencontre de Freud avec l’hystérie masculine à lieu en octobre 1885, à Paris, où il se rend pour assister à l’enseignement de Charcot. Un an plus tard, à Vienne, il expose devant la société des Médecins la conception de l’hystérie masculine qu’il a apprise du maître de la Salpétrière, et son premier travail clinique, présenté peu après devant la dite Société pour répondre à un défi du professeur Meynert, consiste dans l’étude du cas d’Auguste P., qualifié par Freud d’hystérie traumatique. La constance de la thèse selon laquelle l’hystérie comme type clinique existe aussi bien chez l’homme que chez la femme s’atteste de ce que nous pouvons lire dans un des derniers écrits de Lacan : " il n’y a pas de sens commun de l’hystérique, et ce dont joue chez eux ou elles l’identification... ". " L’hystérie masculine " serait donc une question classique de la clinique freudienne, n’était-ce l’absence de paradigme clinique incontestable et la relative marginalité de son abord dans la littérature analytique, qui résonne avec la féminisation le plus couramment pratiquée du genre de l’hystérique. Pourtant, à y voir de plus près, c’est au cœur même du choix du sexe d’une conduit l’interrogation réglée de cette apparente atypie : l’hystérie masculine.
C’est donc grâce à Charcot que Freud fait ses premiers pas dans l’investigation de l’hystérie. Charcot, bien qu’anatomo-pathologiste de formation, aborde l’hystérie essentiellement en clinicien. Ce dont Freud lui fait hommage de façon réitérée, c’est d’avoir constitué l’hystérie en type clinique, dont les formes symptomales diverses peuvent s’ordonner dans une série objectivable, ce qui exclut l’assimilation de l’hystérie à une simulation et assure son insertion dans la science. Dans le même temps, l’hystérie est qualifiée de névrose, c’est-à-dire non réductible à une lésion organique, encore que sur ce point la notion alternative que Charcot propose de " lésion dynamique " soit quelquefois ambiguë.
L’essentiel du frayage dû à Charcot est cependant d’avoir élaboré une conception de traumatisme particulièrement appropriée à l’explication de l’hystérie qu’il appelle " virile ". Le traumatisme, choc local, produit un processus physiologique de parésie provisoire, entraînant chez le sujet ému l’idée d’impuissance motrice d’où résulte, par auto-suggestion, le formation du symptôme hystérique de paralysie. A cette explication correspond une confirmation expérimentale : il est possible de reproduire artificiellement le symptôme hystérique, soit par suggestion sous hypnose, soit par un choc local sous hypnose.
En considérant quelques années plus tard que l’effet pathogène du traumatisme est lié non, comme le voulait Breuer, à un état physiologique particulier, l’état hypnoïde, mais aux significations que le sujet confère au traumatisme, et dont il ne veut rien savoir, Freud se détache irréversiblement de Charcot pour fonder la psychanalyse sur le concept de refoulement.
Rien cependant, jusque là qui fournisse un trait distinctif de l’hystérie masculine. Au contraire, c’est à partir des cures de femmes hystériques que Freud remodèle, sans l’abandonner, la théorie du traumatisme pour ébaucher une théorie du fantasme. Il faudra attendre que la première guerre mondiale actualise la question des névroses de guerre pour que soit repris l’examen des effets pathogènes du traumatisme.
Ce sera la tâche du Ve Congrès international de Psychanalyse à Budapest, en 1918. La position de Freud à l’égard de ces névroses est à la fois prudente et nette : " Si l’examen - encore très poussé - des névroses de guerre n’a pas révélé que la théorie sexuelle des névroses est exacte, cela était tout autre chose que si elle avait révélé que cette théorie n’est pas exacte ".
Aussi conclut-il son introduction : " On peut tout de même à juste titre caractériser le refoulement, qui est à la base de toute névrose, comme une réaction à un traumatisme, comme une névrose traumatique élémentaire ".
Est-ce à dire que Freud considère que la névrose de guerre serait une variante de la névrose hystérique ? même si dans " Au delà du principe de plaisir ", Freud esquisse un rapprochement entre l’hystérie et les névroses traumatiques en faisant remarquer que, tout comme les hystériques souffrent de réminiscences, le névrosé traumatique est fixé psychiquement à son traumatisme, il n’en garde pas moins une certaine réserve. Il est nécessaire de mentionner les raisons de cette réserve parce qu’elles anticipent sur les problèmes fondamentaux et inédits qui peuvent se poser de façon privilégiée à partir de l’hystérie masculine. 1) Dans la névrose traumatique, la souffrance subjective est plus forte et n’est pas sans rappeler l’hypocondrie et la mélancolie. 2) Pour explorer la voie qui permettrait de subsumer les névroses traumatiques sous les névroses de transfert, il faudrait préalablement éclairer d’une part c qu’il en est du masochisme, d’autre part de la libido narcissique. Ce n’est donc pas directement dans la filiation hystérie virile-névrose de guerre que Freud renoue avec son investigation de l’hystérie chez l’homme, mais au travers de deux cas dont l’un est emprunté à l’histoire de la démonologie, celui du peintre Christophe Haizmann, l’autre à l’histoire de la littérature, celui de l’écrivain Fiodor Mikhailovitch Dostoïevski.
Le cas du premier est examiné dans l’article intitulé " une névrose démoniaque au XVILe siècle ", paru en 1923. Freud s’appuie sur un ensemble de documents relatant la signature par Christophe Haizman d’un pacte avec le diable et l’issue, grâce à deux exorcismes, de cette possession. Bien que l’expression de " névrose hystérique " ne figure pas comme telle dans le texte, Freud prend clairement parti : il s’agit d’une " névrose " (et non d’un psychose) ; il s’agit de " manifestations de l’hystérie " sous le " vêtement démonologique " ( à cette occasion, Freud évoque d’ailleurs Charcot qui le premier sut reconnaître l’hystérie sous la dite possession).
L’analyse minutieuse que Freud présente de ce cas peut s’articuler ainsi :
Le pacte avec le diable que signe Haizman en 1669 est consécutif au décès du père d’Haizmann. Voici l’enjeu du pacte : le diable s’engage à remplacer pour neuf ans ce père défunt. Quant au motif du pacte il serait, pour Haizmann, de sortir, grâce à ce remplacement, d’un accès de mélancolie et de l’inhibition au travail qui l’accompagne.
La thèse ne varietur de Freud est que le diable est le substitut du père, bien qu’Haizmann l’ait représenté avec des mamelles qui le féminisent dès le deuxièmes des huit tableaux qu’il a consacré à représenter l’histoire de sa possession.
Si le diable est le substitut du père, le choix d’Haizman de contracter un pacte avec lui témoigne de son amour pour le père. Cependant, la transformation du deuil en mélancolie indique que cet amour pour le père masque la haine pour le père qui s’est développée dans le complexe d’Oedipe. Freud nous livre ici une indication extrêmement précieuse concernant la façon dont il aurait dirigé la cure si Haizmann avait été un de ses patients. Il l’aurait amené " à se ressouvenir quand et à quel propos il eût lieu de craindre son père et le détester " et il aurait essayé de découvrir " les facteurs accidentels qui se sont surajoutés aux facteurs typiques de la haine pour le père ".
Pour la première fois, nous saisissons un trait différentiel majeur de l’hystérie masculine : l’intensité surdéterminée de la haine pour le père dans le complexe d’Oedipe. Observons à cet égard la partie gauche du tryptique peint par Haizmann en1678(entre les deux exorcismes) : on y voit un chien noir aboyer contre le bourgeois qui, dans la série des huit tableaux consacrés à l’histoire de la possession, représente la première figuration du diable et qui, dans ce tryptique, s’interpose entre le chien et une dame qui , curieusement, détient déjà la lettre du pacte. Ainsi, l’art est-il le moyen privilégié d’expression de la haine contre le père et la perte de cet art, consécutive à la mort du père, est-elle aussi pour Haizmann la perte de son désir : " Qui perd son fou perd sa voix ".
L’hypothèse de Freud selon laquelle le père aurait contrarié la vocation artistique d’Haizmann n’apparaît donc pas sans fondement. Dès lors, enfin, la haine du père ainsi refoulée trouvera sa traduction dans le " ravalement " du père en diable.
L’amour pour le père, qui opère une inversion du complexe d’Oedipe, n’est pas pour autant une solution. Certes, il permet à Haizmann d’aluder l’affrontement au père dans la haine : il sert donc l’évitement de la castration du côté masculin au non de la jouissance, mais la question de la castration se repose alors du côté féminin, puisque Haizmann se retrouve dans une position féminine vis à vis du père.
C’est pour contrer la castration du côté féminin que dès le deuxième tableau de la série de huit, Haizmann représente le diable sous une forme féminisée par l’adjonction de mamelles. Haizmann se trouve en effet dans une impasse subjective. Il n’accepte la castration ni du côté homme - il recule devant l’affrontement avec le père -, ni du côté femme - il recule devant l’implication d’une position féminine à l’endroit du père. Le compromis qu’il adopte est précaire : il consiste à représenter le diable en femme, c’est-à-dire à châtrer le père, ce par quoi Haizmann espère maintenir la dénégation de sa propre castration.
Ce qui, en dernière instance, est déterminant, peut maintenant s’appréhender : l’impasse d’Haizmann, son recul devant le choix du sexe est à référer à une ligne de défense contre la castration maternelle. C’est le sens de la deuxième explication de Freud quant au pourquoi de la féminisation du diable. Celle-ci réactive une fixation à la mère, à la mère comme toute puissante, comme Autre non barré. C’est d’ailleurs sur ce versant que va basculer finalement Haizmann, cédant sur son désir pour s’en remettre aux mains de la sainte Vierge, mais de ce fait neutralisant la médiation paternelle qui lui aurait été nécessaire pour sauver son désir, celui-ci se réduisant désormais, après son entrée dans les ordres, à un penchant pour la drive bouteille, dont la prise fonctionne alors comme limite à la jouissance de l’Autre.
l’épisode décisif de cette capitulation est relaté Haizmann lui-même dans son journal. Le 26 décembre 1677, se rendant à l’église St Etienne pour y faire ses prières, il croise une jolie dame et son seigneur bien habillé, ce qui le fit " imaginer " qu’il était " ce seigneur et aussi bien habillé que lui ". Cette substitution à l’homme comme objet d’amour d’une femme, l’aurait-il soutenue qu’il se serait identifié comme homme désirant par le biais du trait un aire " bien habillé ". Or, c’est à quoi il échoue : frappé par " un coup de tonnerre et une flamme éclatante " , il renonce définitivement à assumer sa rivalité hostile avec le père. C’est cette caractéristique de " la couardise " devant le père qu’on retrouve dans l’article de 1928 " Dostoievski et le parricide ". Là encore - similitude qui mériterait à elle seule une étude de la sublimation -, c’est dans la seule expression artistique que Dostomevski peut affronter, dans la mise en scène romanesque du parricide, la haine pour le père. Mais, comme le souligne Freud d’emblée, en dehors de son art, c’est un lâche.
Pour le reste, nous ne pouvons que constater une correspondance remarquable avec l’analyse du cas Haizmann. La maladie touche Dostoilevski dans sa prime jeunesse " sous la forme d’une mélancolie soudaine et sans fondement " ; " il avait alors le sentiment qu’il allait mourir sur le champ ". Freud interprète ce sentiment , sans hésiter, comme signifiant " une identification avec un mort, une personne effectivement morte ou encore vivante, mais dont on souhaite la mort ". Soulignant que le second cas, celui de Dostoievski, est le plus significatif. Il peut alors définir l’attaque hystérique comme " une auto-punition pour le souhait de mort contre le père haï " et en poser comme ressort l’inacceptabilité de la haine envers le père, en tant qu’elle découle de l’angoisse devant le père et de l’effroi de la castration. Chez Dostoïevski comme chez Haizmann, cette angoisse et cet effroi sont redoublés dans la position féminine, voire l’homosexualité, qui ne peuvent donc fournir le rempart recherché contre la castration. " tu voulais tuer le père afin d’être toi-même le père. Maintenant tu es le père, mais le père mort " , tel est le mécanisme du symptôme hystérique chez l’homme. Nous découvrons ainsi la modalité par laquelle l’homme hystérique se distingue de l’homme obsessionnel : au lieu de promouvoir le père mort comme le signifiant-maître, il s’identifie à lui dans le retour du refoulé qu’impose le symptôme hystérique, ce qui ne va pas quelquefois sans défaillance graves de sa propre fonction paternelle dès lors qu’il ne veut rien savoir de la vérité que recèle le symptôme quant à sa castration.
Enfin, nous pouvons noter la dissymétrie que dénote l’hystérie chez l’homme par rapport à l’hystérie chez la femme pour autant que l’amour pour le père est chez elle consécutif à sa castration et qu’elle n’est pas inscrite dans la même logique temporelle dans son rapport au meurtre du père.
Le legs freudien concernant l’hystérie masculine n’ira pas sans avatars. D’une part, en effet, la première génération des élèves de Freud, tels Abraham, Ferenczi et Simmel, s’efforcent, principalement à propos des névroses de guerre, de vérifier la thèse qu’ils imputent à l’orthodoxie freudienne d’un rattachement de ces névroses à l’hystérie traumatique ; ils le font avec un hâte à être freudiens qui a pour contrepartie le gommage des questions suscitées par Freud à partir de l’écart qu’il préserve entre les névroses de guerre et l’hystérie. cependant, ils procèdent avec une grande pertinence clinique, et leur travaux méritent encore aujourd’hui d’être lus avec attention. Nous citerons par exemple la finesse avec laquelle K. Abraham note que, dans une guerre, il " s’agit d’être disposé non seulement à mourir mais également à tuer " , ce devant quoi l’homme hystérique a, nous l’avons vu, des raisons spécifiques de se dérober.
Mention spéciale doit être accordée aux travaux d’Hélène Deutsch sur l’hystérie masculine. Non seulement pour la variété et la typicité des symptômes qu’elle aborde - terreurs nocturnes, énurésie, impuissance... - mais surtout pour la rigueur avec laquelle elle maintient la référence à l’Oedipe et la castration y compris dans l’abord des éventuels fantasmes " féminins " (fantasmes de naissance). Elle note aussi, l’indication clinique de premier plan, combien le recours au père souffre en quelque sorte des dispositions bienveillante et douces de celui-ci : " pas le plus petit geste qui puisse être interprété comme menace de castration ".
Avec ces auteurs se clôt une période de fidélité à Freud. Ce que nous allons rencontrer d’autre part constitue en effet une mise en cause généralisée des thèses de Freud sur l’hystérie masculine (et sur la frontière entre névrose et psychose). Ce mouvement critique est à dater du livre de I. Macalpine et R.A.Hunter, paru en 1956, et dont le titre est programmatique : On schizophrenia, 1677.
L’axe de cette révision s’origine d’une contestation : le diable, dans le cas Haizmann, ne serait pas un substitut paternel, mais un substitut masculin-féminin, bisexuel ou pré-sexuel en tout cas ne relevant pas de la référence oedipienne. Sur cette base, Macalpine et Hunter établissent une équivalence entre le délire de procréation chez le président Schreber et ce qu’ils imputent à Haizmann d’un fantasme délirant de procréation dont témoignerait son pacte avec le diable. Lacan, à propos de l’étude d’Ida Macalpine sur le président Schreber, a fait justice de cette démarche qui se cantonne dans une mise en série des formations imaginaires en occultant ce qui, dans la question du père, constitue un repère de structure indispensable. On ne s’étonnera pas que les deux auteurs concluent en qualifiant Scherber et Haizmann de schizophrènes paranoïdes auxquels ils n’hésitent pas à adjoindre Anna O., de ce qu’elle présente à leur yeux un fantasme de grossesse délirant. On sait aussi les dommages que cette conception a entraîné en faisant tendanciellement s’évanouir le concept même d’hystérie.
Moins hasardeuse est la thèse défendue en 1975 par un psychanalyse belge de l’IPA,G.Vandendriessche. cet auteur considère en effet qu’il est impossible de contester sérieusement la thèse freudienne du diable comme substitut du père, mais il s’appuie sur l’ambivalence foncière quant au sexe, ambivalence selon lui non dialectisable, pour maintenir le diagnostic de psychose. Or, comme nous l’avons vu, cette ambivalence quant au sexe est fondée sur la haine pour le père ; tout le problème est donc de savoir si cette non-assomption relève de la forclusion ou du refoulement. La réponse est déjà dans Freud : chez le paranoïaque, l’énoncé : " je le hais ", " ne peut jamais devenir conscient sous cette forme ". Rien de tel avec Haizmann, pour lequel au contraire Freud pense qu’il aurait fallu l’amener à s’interroger sur la genèse de cet énoncé. Nous verrons cependant comment la difficulté extrême, dans la direction de la cure des hystériques hommes, à maintenir cette orientation, peut expliquer l’impression d’un obstacle infranchissable. Cette quasi-aporie clinique n’est as sans avoir conduit Lacan à élucider les conditions de définition du discours analytique sans lesquelles la position de l’hystérique est inexpugnable.
L’enseignement de Lacan ayant trait à l’homme hystérique ne se laisse pas facilement évaluer parce qu’il résiste à se laisser interpréter comme moulage d’un type clinique que Freud aurait laissé inachevé, ou insuffisamment fondé. Cette remarque peut passer pour paradoxal si l’on énumère les figures célèbres, appartenant à la fiction, comme hamlet, ou à l’histoire, comme Socrate ou hegel, auxquelles Lacan a accolé l’épithète d’hystérique ". Pourtant cette remarque se justifie de ce que l’effort de Lacan ne s’est pas fixé à arrêter un diagnostic et à le justifier, mais à élucider le statut de l’hystérique au regard de l’acte, du transfert, de la science, enfin du discours.
Le titre du séminaire où Lacan développe l’analyse d’hamlet est déjà significatif : le désir et son interprétation. Lacan n’y dément pas la thèse de Freud, qu’on trouve dans la Traumdeutung, et qui fait d’Hamlet un hystérique pour autant qu’il recule devant le meurtre de Claudius parce qu’il n’est pas " meilleur que le pêcheur qu’il veut punir ". Mis il va au-delà, o à côté de cette thèse, en posant une question inédite : qu’est-ce qui permet à Hamlet, en fin de compte, en fin de tragédie, d’agir ? sa réponse, c’est l’identification à Laete d’Hamlet, par laquelle ce dernier accomplit le deuil d’Ophélie, c’est-à-dire réalise que l’objet perdu, à le supposer retrouvé, n’aurait pu le satisfaire. Touché à mort par le même Laerte, Hamlet entrevoit dans l’impossibilité de cet objet la cause même de son désir et peut alors frapper Claudius - Façon, dit Lacan, " d’accoucher de la castration ". Cette retrouvaille avec le désir, qui ici libère l’acte, on sait que Lacan fut tenté un temps d’y voir la fin de l’analyse, et de promouvoir, en donnant relief au passage de l’impuissance à l’acte chez l’homme hystérique, une figure de l’analyste comme sujet désirant, c’est-à-dire en paix avec sa division.
C’est la même interrogation qui se prolonge et s’amplifie avec le séminaire : le transfert, menée cette fois avec Socrate. Si, comme Lacan le dira quelques années plus tard dans " Radiophonie ", Socrate est hystérique parce qu’il " met le maître au pied du mur de produire un savoir ", l’accent est mis non sur les symptômes de Socrate, mais sur ce qui, dans une position à l’endroit du savoir, détermine la mutation d’une doxa en épistémé. Il n’est pas pour cela analyste, sinon " d’une certaine façon ". Dès le séminaire : le transfert en effet, Lacan note comment Socrate se dérobe à Alcibiade décèle en lui l’ayalyse qui le fait désirant, se lavant ainsi les mains du transfert pour mieux se référer à la femme comme seule recèlant la vérité sur l’amour. Que ce soit par un refus de son corps qu’il se dérobe ne doit pas nous tromper. C’est de la construction du fantasme d’Alcibiade qu’il s’élide, faute d’accepter d’y faire semblant comme objet (a).
Avançons donc l’examen approfondi d’Hamlet et de Socrate dans leur rapport à l’hystérie permit à Lacan de récuser une conception de la fin d’analyse comme institution subjective au profit d’une proposition radicalement neuve de destitution subjective. Il devenait alors possible de construire une écriture du discours analytique distincte du discours hystérique. On peut situer cette transition entre l’écrit "  Kant avec Sade " de 1962 et le Séminaire : l’acte analytique (1967-68).
Quelles incidences l’élaboration du discours hystérique, dans ce contexte nouveau dont nous avons d’évoquer brièvement les coordonnées, a-t-elle sur la question de l’hystérie masculine ? nous retiendrons trois points comme jalons d’une étude à poursuivre.
Prélevons d’abord, dans le séminaire : d’un autre à l’Autre (18 juin 1969), cet énoncé de Lacan : " L’hystérique fait l’homme qui supposerait savoir la femme ". Si nous décomposons, nous pouvons attribuer comme trait commun aux hystériques, hommes ou femme, la supposition de la femme comme sujet supposé savoir. Réaliser la femme comme pas-toute, serait ainsi, du côté de l’hystérique homme, équivalent à la destitution subjective.
Cependant, peut-on lire de la même façon pour l’homme et la femme, le " faire l’homme " ? du côté femme, nous pouvons nous fier à l’explication que Lacan propose dès " La direction de la cure et les principe de son pouvoir ". L’identification hystérique d’une femme à une autre femme supposée être l’objet d’amour du père laisse la première sans réponse quant à la question de ce qui attirerait le père dans cette autre femme qui ne saurait pourtant le satisfaire. Une femme s’identifie à l’homme en tant qu’il présentifie cette question... et, ajouterons-nous, sa réponse, de supposer savoir la femme. Qu’en est-il alors du sens de " faire l’homme " pour hystérique, sinon celui de faire l’homme que l’hystérique femme pose comme supposant savoir la femme ?.
Ceci éclaire comment se répartit la question du père châtré selon qu’on est sur le versant homme ou sur le versant femme. Sur le versant femme, le père est châtré parce qu’il ne pourra jamais, sinon comme mort, atteindre la jouissance absolue qu’il vise. Elle s’introduit directement ainsi, de plain-pied, à la fonction du Nom-du-père, et réalise l’essence de son propre désir comme désir insatisfait, de ce qu’aucun père vivant ne pourra le saturer. La dialectique du désir s’inscrit selon la séquence : père châtré-père mort - père réel. sur le versant homme, le père mort n’ouvre pas d’accès à la fonction du père réel : d’un côté il renvoie au père châtré comme impuissant, de l’autre au père réel comme père terrible, c’est-à-dire que des deux côtés, nous avons affaire à l’imaginarisation du père, scindée dans les deux figures de l’impuissant et de l’implacable, auxquelles l’hystérique homme s’identifie tour à tour.
A cet égard, le paradigme de l’hystérique homme, nous oserions le fonder dans le héros de Wedekind, dans la tragédie enfantine à laquelle Lacan a consacré une préface flagrante : c’est Mortiz. Laissons parler Lacan : " Reste qu’un homme se fait l’homme à se situer de l’Un-entre-autres, à s’entrer entre ses semblables. Mortiz, à s’en excepter, s’exclut dans l’au-delà, il n’y a que là qu’il s’y compte : : pas par hasard d’entre les morts exclus du réel ".
Aussi bien, n’y aurait-il pas qu’un homme à pouvoir incarner la perfection de l’hystérique, l’hystérique comme in-analysant... sauf à ce que rencontre avec " un agent du tourment " suffisamment " voisin de sa propre méchanceté " le force à se découvrir comme " prochain ", pour que le pire soit enfin sûr ?

Hystérie hypnoïde


L’hystérie hypnoïde est une forme d’hystérie introduite par Breuer et Freud dans les années 1894-95 qui trouvait son origine dans les états hypnoïdes. Cette hystérie se caractérise par une incapacité ou difficulté du sujet à intégrer dans sa personne et histoire les représentations qui apparaissent pendant les états hypnoïdes.
Analogue au sommeil. Selon Breuer, le collaborateur de Freud dans les Études sur l'hystérie (1895), les états hypnoïdes se produisent fréquemment chez les femmes qui ont des activités telles que les travaux ménagers qui ne requièrent pas leur pleine attention et prédisposent à l'HYSTÉRIE.

Les 4 sortes d’hystérie :

• Hystérie de rétention : elle se caractérise par le fait que les affects, notamment sous l’action de circonstances extérieures défavorables, n’ont pas pu s’exprimer. C’est à dire que le sujet ressent une émotion très vive mais il en peut l’exprimer à cause du contexte, il va la réprimer. L’affect ne trouve pas à s’exprimer et ne peut donc pas s’abréagir (c’est le contexte qui rend l’abréaction impossible).
Hystérie hypnoïde : elle est provoquée par le fait que le sujet se trouve en état d’autohypnose au moment où l’affect intense se manifeste. Ce n’est pas le contexte mais l’état hypnoïde qui ne permet pas l’abréaction. Freud la met un peu de côté.
• Hystérie traumatique : les symptômes somatiques surviennent après un temps de latence consécutif à un traumatisme physique. Ce sont des traumas physiques qui vont toucher l’intégrité physique de l’individu (il risque de mourir). Elle va se développer suite à la névrose de guerre.
• Hystérie de défense (très importante historiquement) : l’activité de défense, contre des représentations susceptibles de provoquer des affects déplaisants, sera centrale. Progressivement, Freud va l’introduire comme permettant de souligner l’importance du mécanisme défensif dans l’appareil psychique importance de la défense par rapport à l’état hypnoïde (cher à Breuer) 

samedi 30 juillet 2011

Hystérie de rétention


L’hystérie de rétention est une forme d’hystérie introduite par Breuer et Freud dans les années 1894-95. Cette hystérie, que Freud distinguait de  l’hystérie hypnoïde et l’hystérie de défense, se caractérise par le fait que des affects n’ont pas pu être abréagis.
L'hystérie de rétention découle donc de l'accumulation prolongée d'une quantité d'affects, d'excitation qui n'a pu être abréagie (libérée) normalement.
Dans l’hystérie de rétention, le rôle du clivage de conscience est minime, ou peut‑être tout à fait nul. Il s’agit des cas dans lesquels la réaction à l’excitation traumatique ne s’est simplement pas produite, et qui peuvent donc être aussi liquidés et guéris par abréaction ( voir Abréaction )

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Le champ clinique des phénomènes inconscients : L’hystérie 1886-1893



(Paul Bercherie)
(5ème partie)

La moisson cathartique: 1892-1893

A. La communication préliminaire
Dès l'article de 1890 sur le « Traitement psychique », Freud commence à relever les faiblesses du traitement suggestif et à exprimer une certaine déception : « Les patients névrotiques sont précisément pour la plupart de mauvais sujets hypnotiques, de sorte que les puissantes forces par lesquelles la maladie s'enracine dans l'esprit du malade doivent être contrebalancées non par une complète influence hypnotique mais seulement par un fragment de celle-ci. [...] Un traitement hypnotique unique, en conséquence, ne changera rien à des désordres sévères d'origine mentale.
Cependant, si l'hypnose est répétée, elle perd une partie de l'effet miraculeux que le patient avait peut-être espéré. Une succession d'hypnoses peut éventuellement amener par degrés [...] un résultat satisfaisant. [...] Mais un traitement hypnotique de ce genre peut être tout aussi fastidieux et fatigant que n'importe quel autre. » Freud relève en outre un autre type de difficulté : un bon succès initial mais de durée précaire ; « si cela se répète assez souvent, cela épuise en général la patience du patient comme du médecin et se termine par l'abandon du traitement hypnotique. Ce sont aussi les cas où le patient devient dépendant du médecin et où une sorte de besoin de l'hypnose s'installe ».
Aussi Freud termine-t-il l'article par le vœu de disposer bientôt d'une meilleure méthode: « une meilleure compréhension des processus de la vie mentale, dont l'amorce se base précisément sur l'expérience hypnotique, désignera les chemins et les moyens de cette fin ». On retrouve dans l'article de 1891 ces réflexions désabusées : Si le traitement se prolonge, « le médecin comme le patient se fatigue très vite, ce qui résulte du contraste entre la coloration délibérément optimiste des suggestions et la triste vérité.
[...] Dans tout traitement hypnotique prolongé, il faut soigneusement éviter une procédure monotone. Le médecin doit constamment être à la recherche d'un nouveau point de départ pour ses suggestions, d'une nouvelle preuve de son pouvoir, d'une nouvelle modification dans sa procédure d'hypnotisation. Pour lui aussi qui a peut être des doutes à propos du succès final, cela représente un grand et à la fin un épuisant effort ». En 1892 (« Notes à la traduction des Leçons du mardi de Charcot »), Freud sera encore plus net : « A la longue, ni le médecin m le patient ne peuvent tolérer la contradiction entre la dénégation décidée de la maladie dans la suggestion et sa nécessaire reconnaissance hors de celle-ci. »
Rien d'étonnant dans ces conditions à ce que dans sa quête d'un moyen thérapeutique plus satisfaisant, il se soit dès 1889 tourné vers ce qui lui apparaît comme un procédé plus réaliste, un véritable traitement causal, le procédé cathartique qu'Anna O. a suggéré à Breuer huit ans plus tôt. Ainsi peut-il préciser ses vues sur l'hystérie et y réintéresser Breuer : les deux amis arrivent alors à une position commune qu'ils exposent ensemble dans la « Communication préliminaire » de 1892. Analysons-en rapidement le contenu, paragraphe par paragraphe :
1) C'est de réminiscences surtout que souffre l'hystérique ». Toute hystérie se révèle de structure identique à l'hystérie traumatique de Charcot : les symptômes renvoient à des souvenirs par expression directe, partielle, symbolique ou déplacée (événements simultanés). Inconscients ou partiellement conscients seulement, ces événements à forte charge affective (traumatismes psychiques) agissent ainsi non simplement comme des « agents provocateurs » (Charcot) mais comme des causes pathogènes permanentes, véritables « corps étrangers internes ».
2).L'usure normale des souvenirs à forte charge émotive se fait par réaction volontaire, expression émotive ou verbale, intégration associative enfin - la représentation en est intégrée au réseau d'associations mentales, et donc ainsi tamponnée, contrebalancée par des idées contraires (ainsi du souvenir d'une humiliation par ceux de petits succès). Dans le cas de l'hystérie, « les représentations devenues pathogènes se maintiennent [...] dans toute leur fraîcheur et toujours aussi chargés d'émotion [...] parce que l'usure normale [...] leur est interdit » du fait de leur caractère inconscient.
Deux groupes de causes engendrent ces représentations inconscientes pathogènes : d'abord les situations où le sujet n'a pas pu ou voulu réagir impossibilité intrinsèque de réaction (par exemple, perte irréparable d'un être aimé), répression de la réaction pour des raisons sociales, refoulement intentionnel hors de la conscience de l'ensemble du contenu représentatif traumatique enfin. Ensuite, des états de sidération, d’obnubilation psychique qui paralysent toute possibilité de réaction affects paralysants (frayeur : cf. les cas traumatiques de Charcot), autohypnose spontanée (« états hypnoïdes »). Les deux séries de causes peuvent bien sûr se mêler (série complémentaire).
3).  « La dissociation du conscient [...] existe rudimentairement dans toutes les hystéries ». Phénomène fondamental de la névrose, homologue aux états hypnoïdes, cette dissociation relève soit d'une prédisposition innée, soit d'un trauma grave ou d'une répression difficile (hystérie acquise). Les auteurs insistent en revanche sur le fait « qu'on trouve parfois, parmi les hystériques, des personnes possédant une grande clarté de vues, une très forte volonté, un caractère des plus fermes, un esprit des plus critiques ».
4). L'accès hystérique et les états d'hystérie aiguë (psychoses hystériques au sens de Charcot) représentent un envahissement de la conscience par l'état de conscience dissociée hypnoïde qui « se rend maître [...] de l'innervation corporelle du malade et gouverne toute l'existence de celui-ci ». La conscience normale demeure cependant présente, de même que l'état hypnoïde quand la première reprend le dessus - il commande alors une partie de l'innervation corporelle, donnant naissance aux symptômes permanents de l'hystérie chronique.
5). Le procédé cathartique supprime les effets de la représentation pathogène en rétablissant grâce à l'hypnose ses liens avec le conscient, « en permettant à l'affect étouffé de se déverser verbalement » et de subir l'usure normale. Mais ce procédé symptomatique n'a guère d'action sur les états aigus comme sur la prédisposition: « la cause interne de l'hystérie reste à découvrir ».
Dans son ensemble, cet exposé est d'un esprit très proche du Janet de L'Automatisme psychologique. Dans L'Etat mental des hystériques, Janet désignera la « Communication préliminaire » comme « le travail le plus important qui soit venu confirmer nos anciennes études », tandis que Breuer et Freud citent un cas de Janet, « histoire d'une guérison obtenue, chez une jeune fille hystérique, par un procédé analogue au nôtre ». Il est justement d'autant plus important de relever les points de divergence des deux conceptions, qui portent sur la théorie de la personnalité hystérique chez Janet et expliquent le faible intérêt porté par ce dernier au procédé cathartique (il ne l'a d'ailleurs en fait encore jamais employé : il opère assez différemment).
Comme je l'ai déjà signalé au paragraphe précédent, Janet est sensible à la dissociabilité du psychisme hystérique qu'il considère comme une faiblesse dégénérative, une « insuffisance psychologique »; Breuer et Freud voient dans la dissociation la conséquence de la constitution d'une sorte d'excroissance psychique, un surplus énergétique que la catharsis réduit (abréaction), soulageant ainsi le psychisme par ailleurs normal des hystériques (cf. le paragraphe 3 de la « Communication préliminaire ».
C'est sur l'origine de cette « hernie » mentale que Breuer et Freud vont bientôt diverger; dans cette quête où Freud s'engage sans réserve gît le ressort de son originalité : il y découvrira la psychanalyse. Mais nous comprendrons mieux les enjeux de tout cela en examinant de près les conceptions théoriques de Breuer, tel qu'il les expose en 1895 dans le chapitre 3 des Etudes sur l'hystérie.

Entre-temps, Freud a poursuivi sa progression, laissant sur place son ami dont l'expérience se résume presque entièrement à son premier cas. Aussi faut-il lire l'exposé de Breuer en gardant à l'esprit qu'il s'agit là de la position initialement commune, comme nous le vérifierons ensuite par l'examen des textes de Freud des années 1892-1893.
B. La théorie de Breuer
Mais pour commencer tentons d'éclaircir un point intrigant : d'où provient l'idée du procédé cathartique ? Breuer s'en explique lui-même « J'affirme [...] que je n'ai nullement cherché à suggérer ma découverte à ma patiente; au contraire, ma stupéfaction a été immense et ce n'est qu'après toute une série de liquidations spontanées que je pus en tirer une technique thérapeutique. » C'est là un fait bien connu : la talking cure est l'invention d'Anna O... Mais qu'est-ce qui a pu donner à Breuer l'idée de suivre les indications de sa malade et d'imiter docilement par l'hypnose son comportement dans ses états hypnoïdes ?
C'est là qu'intervient le poids de la tradition magnétique : on n'a pas assez souligné en effet que Breuer ne tient la pratique de l'hypnose ni de Charcot, qui n'a à l'époque pas encore fait sa célèbre communication à l'Académie des sciences, ni de Bernheim, qui ne fera connaître sa pratique et celle de Liébault que plusieurs années plus tard. Comme l'a indiqué Ellenberger, c'est directement par le magnétiseur public Hansen que les médecins allemands de cette époque prennent connaissance de l'hypnose : Freud, Breuer, Benedikt ont assisté à ses présentations de même qu'Heidenhaim qui publiera en 1380 la première étude positive en langue allemande des phénomènes hypnotiques.
Or, je l'ai signalé, c'est un des thèmes fondamentaux du magnétisme animal que le somnambule peut indiquer grâce à sa « lucidité » particulière l'origine de son mal et les moyens de le guérir (il peut aussi en faire autant pour d'autres d'ailleurs) ; depuis des décades, les magnétiseurs suivaient ainsi scrupuleusement les indications de leurs médiums.
Revenons maintenant aux conceptions théoriques que Breuer déduit à l'évidence du cas d'Anna O... Son point de départ est dans la critique de la définition de Möbius : certes, il admet qu' « un grand nombre de phénomènes hystériques, plus peut-être que nous ne l'imaginons aujourd'hui, sont idéogènes » et reposent donc sur des représentations. Mais ce phénomène même de l'action pathogène de certaines représentations ne se comprend qu'à l'intérieur de l'état psychique particulier qui l'engendre et qui caractérise l'hystérie.
Il va donc lui falloir se lancer dans « l'exposé physiologique de processus psychiques complexes ». Nous retrouvons là une critique très homologue à celles que Freud adresse à Bernheim : lorsque les phénomènes se situent dans la sphère psychique mais ne se réduisent pas au jeu des idées dans la conscience, une interprétation psychophysiologique est nécessaire. Breuer va donc proposer l'idée d'un « appareil nerveux cérébral » dont il emprunte le modèle au fonctionnement d'une « installation électrique montée avec de nombreuses dérivations et destinée à assurer l'éclairage et la transmission d'une force motrice.
[...] Pour que la machine soit toujours prête à travailler, il faut que, même au cours des périodes de repos fonctionnel, une certaine tension persiste dans tout le réseau conducteur et, dans ce but, la dynamo doit utiliser une certaine quantité d'énergie. C'est de la même façon qu'un certain degré d'excitation doit aussi se maintenir dans les voies de transmission du cerveau au repos ». La tension tonique, « excitation nerveuse intracérébrale », doit donc demeurer à un certain niveau constant pour un fonctionnement normal à l'optimum, toutes les voies associatives sont perméabilisées, toutes les associations frayées, et le jeu des activités mentales se déroule sans défectuosité.
Au-delà d'un certain seuil, la diminution de la tension tonique entraîne une sensation de fatigue et un mauvais fonctionnement (modèle de la confusion mentale Meynert), voire une suppression (sommeil) des liens associatifs ; dans le cas du sommeil, la réparation par le repos des réserves énergétiques permet ensuite une reprise du tonus et de l'activité physiologique. A l'inverse, une augmentation excessive de l'énergie tonique amène un sentiment de déplaisir, une sensation de tension, de surexcitation nerveuse et une propension à la décharge par une activité motrice ou une expression émotive adéquates ; en cas d'impossibilité, on observe du nervosisme, de l'agitation.
L'appareil tend ainsi en effet à maintenir constant par ces mécanismes (sommeil, décharge) la quantité totale d'énergie qu'il renferme (Breuer renvoie ici au « principe de constance de Freud »). Des sources permanentes d'excitation, exogènes (stimuli externes) ou endogènes (affects, besoins organiques, en particulier sexuels), sont d'autre part à l’œuvre et sollicitent constamment les capacités d'équilibre de l'appareil mental-cérébral.
Le trauma (ou les traumas : possibilité de sommation) consiste précisément dans une situation où il y a impossibilité de décharger une quantité importante d'énergie : nous en avons vu les conditions. Alors se crée un réflexe psychique anormal, forme primaire de l'hystérie (c'est l'hystérie « de rétention » de Freud) : l'excitation cérébrale anormalement élevée « grille » une des « résistances électriques » de l'appareil et se décharge ainsi à la périphérie sous la forme d'une manifestation anormale, déviante, d'affect.
Le « court-circuit » fait par la même occasion disparaître la quantité, donc la sensation, centrale (consciente). La voie frayée peut ensuite resservir : la conscience n en sera plus informée ; c'est la première raison du caractère inconscient des traumatismes psychiques, ou tout au moins de leur affect.
Certaines conditions pathologiques favorisent le réflexe psychique anormal ou conversion (terme que Breuer attribue à Freud) en diminuant les « résistances » intersystémiques cérébrales : constitution particulière prédisposée, affaiblissement général (épuisement, grandes phases de mutation physiologique comme la puberté), maladie locale jouant le rôle d'un point d'appel.
Ainsi s'explique la constitution du symptôme hystérique; quant a sa pérennisation, elle nécessite la constitution d'un groupe psychique isolé du reste des associations mentales, c'est-à-dire une dissociation psychique. Pour Breuer, cet état de fait ne peut avoir qu'une cause : l'existence préalable d'états de conscience dissociés, d'états hypnoïdes. Il fait certes mention à titre de deuxième entrée étiologique de l'hypothèse freudienne de la défense (refoulement) mais en annule aussitôt la portée: « Les observations et les analyses de Freud montrent que la dissociation du psychisme peut aussi être provoquée par une « défense ».
[...] Néanmoins cela ne se produit que chez certaines personnes, auxquelles nous devons donc attribuer une constitution mentale particulière. [...] Je ne saurais dire qu'elle est la nature de cette constitution particulière. Je m'aventurerai seulement à suggérer que l'assistance de l'état hypnoïde est nécessaire si la défense doit entraîner non pas simplement que des idées converties individuelles deviennent inconscientes, mais une véritable dissociation du psychisme.
L'autohypnose a pour ainsi dire créé l'espace ou la région d'activité mentale inconsciente dans laquelle les idées auxquelles il faut parer sont repoussées ». A ce stade donc, Freud et Breuer sont d'accord avec Janet pour considérer comme nécessairement pathologique l'existence de « ces sortes de représentations actuelles qui demeurent inconscientes non point parce qu'elles manquent de vivacité, mais au contraire en dépit de leur grande intensité », qu'ils appellent des « représentations incapables de devenir conscientes ».
L'inconscient « normal » recouvre donc des représentations trop faibles pour devenir conscientes ou capables de le devenir à un autre moment, en fonction des fluctuations de l'attention (ce que Freud appellera plus tard préconscient). Breuer et Freud ne commencent à diverger que dans l'explication de l'existence de ces représentations, le premier restant très proche de Janet, le second avançant de plus en plus fermement sa thèse personnelle sur la défense.
Il est donc naturel de voir Breuer chercher dans une prédisposition constitutionnelle particulière la cause dernière de l'hystérie. Nous avons déjà vu deux aspects de cette prédisposition complexe : d'abord, la « tendance à l'hypnoïde », phénomène capital de la maladie ; ensuite, la faiblesse des « résistances cérébrales intersystémiques » qui autorise les conversions (« complaisance somatique » freudienne), c'est-à-dire le passage du surplus d'excitation corticale dans les « appareils nerveux sensitifs qui ne sont normalement accessibles qu'aux stimuli périphériques, de même que [dans] les appareils nerveux des organes végétatifs qui sont (normalement) isolés du système nerveux central par de puissantes résistances »).
Reste un troisième facteur, capital puisque c'est lui qui fonde la divergence de vue avec Janet c'est la « productivité mentale débordante [des] hystériques. [...] Leur vivacité et leur agitation, leur besoin de sensations et d'activité intellectuelle, leur inaptitude à supporter la monotonie et l'ennui peuvent s'expliquer de la manière suivante : ils appartiennent à une catégorie d'individus dont le système nerveux libère, à l'état de repos, un excédent d'excitation qui exige d'être utilisé ». Bien entendu, « la grande majorité des êtres vifs et agiles ne deviennent pas, pour autant, hystériques » : il y faut aussi l’action conjointe des deux autres facteurs et de circonstances traumatiques.
Mais ce dernier facteur est essentiel; en effet, il explique bien des traits de caractère chez les hystériques, comme leur tempérament passionné ou ce que Janet appellera plus tard recherche de l'excitation: « Leur besoin de sensation les pousse [...] à interrompre le cours monotone de leur existence par toutes sortes d' « incidents » qui constituent [...] surtout des phénomènes pathologiques » ; ainsi Breuer oppose-t-il leur « besoin de maladie » a la peur de la maladie des hypochondriaques.
Il lui semble donc que « Janet a établi ses conceptions principales en étudiant à fond les hystériques débiles mentaux que recueillent les hôpitaux et les asiles » c'est pourquoi son « opinion est inadmissible ». Quand elle existe, la « faiblesse mentale » des hystériques non débiles est une manifestation secondaire de la maladie elle est due à l'énorme perte d'énergie qu'engendrent la dissociation et les conversions d'affects.
De même pour la suggestibilité: « Le psychisme inconscient et dissocié des hystériques est éminemment suggestionnable par suite de la pauvreté et du caractère incomplet de son contenu idéatif »; il s'agit d'un état proche du monoïdéisme hypnotique où la défectuosité du jeu des associations mentales exclut la critique et laisse libre cours à l' « idéodynamisme », pour employer le vocabulaire de Bernheim. Lorsque l'intégrité mentale se rétablit, par exemple à la suite du traitement cathartique, nombre d'hystériques retrouvent leurs éminentes qualités mentales (voir le paragraphe 3 de la « Communication préliminaire »).
La position particulière de Breuer et Freud est ici soutenue par deux facteurs : d'abord, le type de malades auxquelles ils ont affaire et qui diffèrent incontestablement de celles de Janet (milieu social, culture, mais aussi personnalité), tout au moins superficiellement. S'y ajoute l'évident contre-transfert positif que ces patientes aristocratiques engendrent chez les deux médecins : leurs appréciations enthousiastes laissent tout de même un peu rêveur à la lecture du protocole des cas.
Freud soulignera d'ailleurs dans le chapitre sur la « Psychothérapie de l'hystérie » des Etudes sur la nécessité pour l'utilisation du procédé cathartique de « beaucoup de sympathie personnelle pour les malades [et d'] un certain degré d'intelligence au-dessous duquel il reste tout à fait inutilisable »; - ensuite, la position théorique qui leur est commune et qui, nous l'avons déjà noté à plusieurs reprises, repose sur les conceptions de l'école de Helmholtz. L'application de ces principes, Breuer en fournit quelques exemples caricaturaux voire grotesques, du circuit électrique comme modèle du psychisme à l'analyse des phénomènes moraux aussi complexes que le remords ou le besoin de vengeance en terme de « réflexe inaccompli » dont l'énergie intacte continue à se chercher une voie de décharge et qui vient trouver modèle dans l'irritation « essentiellement semblable » de l'inhibition du réflexe sternutatoire.
Nous assistons là à un phénomène épistémologiquement très édifiant un modèle théorique archaïque permet une percée dans un champ pourtant couvert par des modèles beaucoup plus englobants (Janet) ; le scotome que transporte ce modèle sur un point capital (la personnalité comme structure globale) le rend d'une valeur heuristique remarquable sur son envers, c'est-à-dire dans l'examen des symptômes isolés.
La psychanalyse y prend son départ à travers la quête freudienne de l'origine de la « quantité excédentaire" du symptôme. Rien ne peut mieux illustrer le rôle du regard théorique dans la recherche clinique ni l'aspect fortuit, et transcendant souvent ce cadre premier, des découvertes que l'abord théorique autorise parfois.

vendredi 29 juillet 2011

Hystérie de défense


L’hystérie de défense est une forme d’hystérie introduite par Freud dans les années 1894-95. Cette hystérie, qui Freud distinguait de  l’hystérie hypnoïde et l’hystérie de rétention, se caractérise par l’activité de défense que le sujet mobilise contre des représentations provoquant des affects pénibles. Freud abandonne cette forme d’hystérie parce qu’il reconnaît la mise en œuvre des défenses dans toute hystérie. 

mercredi 27 juillet 2011

Hystérie de conversion


La conversion est le noyau de l'hystérie affirme Freud. Dans l'hystérie, l'idée incompatible est rendue inoffensive par le fait que sa somme d'excitation est transformée en quelque chose de somatique. Pour ceci, je désire proposer le nom de conversion. (...) Le moi a ainsi pu se libérer de la contradiction, mais en échange il s'est chargé d'un symbole mnésique, innervation motrice insoluble ou sensation hallucinatoire revenant sans cesse. 
Le stress d'un conflit psychique peut conduire tout le monde à réagir temporairement par des symptômes somatiques. Dans les réactions de conversion, les conflits psychiques sont inconsciemment convertis en symptômes qui semblent être physiques, sans qu'une cause organique puisse être identifiée. Parmi les symptômes courants de l'hystérie de conversion figurent la paralysie musculaire, la cécité, la surdité et les tremblements.
L'hystérie de conversion est une affection aux symptômes changeants touchant le corps dans ses aspects imaginaires et de relation à autrui. L'association de symptômes de conversion et d'une personnalité hystérique définit le terme de « névrose hystérique » qui n'est plus reconnue comme une entité par les classifications actuelles des troubles mentaux. ○ La difficulté clinique face aux troubles de conversion réside à 2 niveaux: bien reconnaître une affection psychique sous des masques d'allure organique, et intégrer les symptômes, comme la personnalité associée, dans une vision dynamique et une trajectoire individuelle. Cette dynamique aidera à comprendre la survenue de symptômes conversifs à la suite d'un traumatisme, récent ou réactualisé, ou de représentations inacceptables et refoulées. ○ Le terme de conversion rend compte de conflits psychiques inconscients s'exprimant de façon déguisée par un symptôme touchant la vie de relation: motricité, sensibilité, sensorialité ou fonctions neurovégétatives; mais aussi les différentes facettes de la conscience (éveil, mémoire, identité, etc.). Il est admis que les symptômes de conversion peuvent se rencontrer quelle que soit la structure de la personnalité du malade: anxio-névrotique, psychotique, limite, etc. L'actualité de l'hystérie pour le clinicien consiste à dépasser la vision historique du XIXe siècle cherchant la distinction entre l'organique et le fonctionnel. Les symptômes hystériques ne prennent tout leur sens que par l'étude de la personnalité du sujet et des interactions de ce sujet avec le monde environnant. En fait, de façon très pragmatique et schématique, les problèmes que pose l'hystérie de conversion sont, souvent dans l'urgence, de faire la part d'une pathologie organique tout en restant particulièrement sensible à la vie et au fonctionnement psychique du patient. 
La genèse de toute forme d’hystérie remonte à l’enfance de la personne concernée avec tout ce qu’elle comprend comme situations conflictuelles inhérentes au développement tout à fait normale de l’individu. Parmi les situations conflictuelles considérées comme un passage obligé c’est le complexe d’Œdipe. Selon une légende ancienne de l’époque grecque  : Œdipe tua son père puis épousa sa mère qui lui donna des enfants, suite à cela les dieux lui infligent les plus pénibles des punitions pour avoir commis ces terribles actions. Comme le complexe d’Œdipe est un passage obligé faisant partie intégrante de l’évolution psychologique normale de toute personne fille ou garçon .Une évolution tout à fait normale fait que le petit garçon s’identifiera à son père en même temps qu’ il renoncera à ses sentiments tendres envers sa mère et les déplacera plus tard vers d’autres femmes, de même la petite fille renoncera à ses sentiments tendres envers son père et s’identifiera à sa mère pour orienter plus tard ses tendres sentiments vers d’autres hommes. Toute déviation par rapport à ce schéma de passage sécurisé par le complexe d’Œdipe suppose la naissance de conflits intra psychologiques nécessitant beaucoup d’effort et d’énergie pour se maintenir en situation d’équilibre sur le plan psychologique. Par conséquent la résolution des conflits internes provoqués par le complexe d’Œdipe nécessite la libération d’une grande quantité d’énergie ‘’psychologique’’, qui servira au maintient d’une équilibre interne jusqu’à l’âge adulte .Pour certaines personnes les choses ne se passeront pas d’une manière aussi simple et l’effort psychologique qui a servi pour se maintenir en équilibre va lâcher et donnera lieu à l’émergence de l’état de l’hystérie. Dans le cas de l’hystérie de conversion, la quantité d’énergie mobilisée pour la résolution des conflits relatifs au stade Œdipien va être convertie en symptômes corporels au lieu que cela soit transformée en angoisse pour donner lieu à l’hystérie d’angoisse ou déplacée sur des objets extérieurs ou des dangers extérieurs pour donner lieu à des phobies ou l’hystérie phobique. 
Une crise d’hystérie de conversion se présente par des manifestations passagères ou permanentes des diverses natures le plus fréquentes sont les paralysies locales ou localisées et parfois plus étendues, genre paralysie de la fonction de la marche ou de la stature debout, sachant que ces paralysies se produisent en l’absence de toute anomalie organique au niveau des organes ou partie du corps faisant défaut et du coup apparaissent aux yeux du médecin traitant comme pas très véridiques et plutôt ayant un caractère théâtral. Parfois, il ya en même temps des troubles d’ordre sensoriel tel que la perte de la vue (cécité hystérique), de l’ouïe (surdité hystérique) ou la perte de la possibilité de sentir les odeurs, bien entendu toutes ces manifestations n’ont aucune justification organique tel qu’une infection au niveau des organes dont la fonction a été atteinte. Une autre catégorie des manifestations de l’hystérie de conversion étant celle des anesthésies hystériques, elles ne correspondent à aucun schéma corporel précis mais se manifestent un peu à la guise de l’hystérique, évidemment sans aucune explication d’ordre neurologique. Aussi, des contractures hystériques peuvent se produire dans n’importe quelle partie du corps, cependant le plus fréquent elles se localisent au niveau du cou. Parfois l’hystérique va simuler n’importe quelle maladie organique en exprimant des sensations de douleurs particulièrement à l’estomac et dans tout organe creux de son corps, encore une fois l’aspect théâtral est présent dans l’esprit du médecin traitant après avoir s’assurer qu’aucun trouble ou maladie organique ne soit effectivement à l’origine des douleurs exprimées .La manifestation d’une crise d’hystérie de conversion se caractérise par des divers signes dont le dénominateur commun c’est la somatisation et l’absence de toute infection ou atteinte organique justifiant les symptômes présentés par l’hystérique et ainsi l’hystérie est considérée comme la maladie de «  l’hyperexpressivité somatique  » par excellence.
D’abord ,le médecin doit identifier le cas d’hystérie de conversion sans le moindre doute car cela nécessite souvent un diagnostic précis soutenu par des examens et analyses spécifiques écartant toute origine organique des symptômes observés chez le patient ou patiente. Une fois l’hystérie de conversion a été bien confirmée, certains médecins procèdent systématiquement à l’isolement de la personne concernée de sa famille et du public en général pour permettre la dédramatisation de la situation, souvent cela se fait par l’hospitalisation dans des centres hospitaliers spécialisés en associant par la suite un traitement médicamenteux approprié et au besoin une psychothérapie et ou une psychanalyse à titre de traitement de fond. 
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Inhibition, symptôme et angoisse
(5ème partie)
Nous nous proposions d'étudier la formation de symptôme et la lutte secondaire du moi contre le symptôme, mais il est évident qu'en choisissant les phobies nous n'avons pas eu la main heureuse. L'angoisse, qui prédomine dans le tableau de ces affections, nous apparaît maintenant comme une complication qui obscurcit la situation. Il y a quantité de névroses qui ne présentent aucun élément d'angoisse. L'hystérie de conversion authentique est de ce type; on trouve ses symptômes, même les plus graves, purs de toute angoisse.
Ce seul fait devrait nous avertir de ne pas établir de liens trop serrés entre l'angoisse et la formation de symptôme. Les phobies sont, à tout autre égard, si proches des hystéries de conversion, que je me suis cru autorisé à les ranger dans les hystéries sous le nom « d'hystéries d'angoisse ». Mais personne encore n'a su indiquer la condition déterminante pour qu'un cas prenne la forme d'une hystérie de conversion ou celle d'une phobie. Personne, par conséquent, n'a élucidé la condition déterminant le développement d'angoisse dans le cas de l'hystérie.
Les symptômes les plus fréquents de l'hystérie de conversion - paralysie motrice, contracture ou action involontaire ou encore décharge motrice, douleur, hallucination - sont des processus d'investissement, soit maintenus en permanence, soit intermittents, ce qui prépare de nouvelles difficultés à l'explication. Au vrai, nous savons peu de chose au sujet de tels symptômes. L'analyse peut nous apprendre quel est le cours d'excitation perturbé auquel ils se substituent.
La plupart du temps, il s'avère qu'ils participent eux-mêmes à ce cours, comme si, par conséquent, la totalité de l'énergie de ce cours s'était concentrée sur ce seul point. Ainsi, la douleur dont souffre le patient était présente dans la situation où se produisit le refoulement; l'hallucination actuelle était alors perception ; la paralysie motrice est la défense contre une action qui aurait dû être accomplie dans cette situation mais fut inhibée; la contracture est habituellement le déplacement d'une innervation musculaire, projetée jadis et portant sur une autre partie du corps; l'attaque convulsive, l'expression d'une explosion d'affect qui s'est soustraite au contrôle normal du moi.
La sensation de déplaisir qui accompagne l'apparition du symptôme varie dans une mesure étonnante. Dans le cas des symptômes permanents, déplacés sur la motilité, tels que paralysies et contractures, cette sensation fait le plus souvent complètement défaut, le moi se comportant devant les symptômes comme s'il n'était nullement concerné ; il est de règle au contraire que dans le cas des symptômes intermittents et de ceux qui touchent à la sphère sensorielle, des sensations incontestables de déplaisir soient éprouvées, qui peuvent, dans le cas des symptômes de douleur, atteindre un niveau excessif. il est très difficile de démêler, dans cette diversité, le facteur qui, responsable de pareilles différences, permette pourtant de les expliquer de manière unitaire.
Il n'y a guère de traces non plus, dans l'hystérie de conversion, du combat livré par le moi contre le symptôme, une fois que ce dernier est formé. Ce n'est guère que lorsque la sensibilisation d'un endroit du corps constitue le symptôme, que Cet endroit est amené à jouer un double rôle. Le symptôme de douleur se produit avec la même régularité, que cet endroit soit touché de l'extérieur ou activé de l'intérieur par association, et le moi recourt à des mesures de précaution, pour éviter que la perception extérieure n'éveille le symptôme.
D'où provient la particulière opacité de la formation de symptôme dans l'hystérie de conversion? C'est ce que nous ne sommes pas en mesure d'élucider. Mais cela nous fournit un motif pour nous hâter de quitter ce domaine stérile. Tournons-nous vers la névrose obsessionnelle dans l'espoir d'en apprendre davantage sur la formation de symptôme. En général les symptômes de la névrose obsessionnelle revêtent deux formes et suivent deux tendances opposées.
Ce sont ou bien des interdictions, des mesures de précaution, des pénitences, des symptômes de nature négative donc, ou bien au contraire des satisfactions substitutives, très souvent cachées sous un déguisement symbolique. De ces deux groupes, le groupe négatif, défensif, répressif est le plus ancien; mais avec la prolongation de la maladie, les satisfactions qui se moquent de toute espèce de défense prennent le dessus.
La formation de symptôme triomphe lorsque l'interdiction parvient à être amalgamée à la satisfaction, en sorte que l'injonction ou l'interdiction originellement défensives prennent aussi le sens d'une satisfaction; et pour atteindre ce but il n'est pas rare que des modes de liaisons fort artificiels soient utilisés. Ce tour de force montre la tendance du moi à la synthèse, tendance que nous lui avons déjà reconnue.
Dans les cas extrêmes, le malade réussit à obtenir que la plupart de ses symptômes, outre leur signification originelle, acquièrent celle de leur contraire direct. Témoignage de la puissance de l'ambivalence, qui joue, sans que nous sachions pourquoi, un si grand rôle dans la névrose obsessionnelle. Dans le cas le plus grossier, le symptôme comprend deux temps, c'est-à-dire que l'action exécutant une prescription déterminée est immédiatement suivie d'une seconde action qui la supprime ou la défait, quoiqu'elle n'ose point encore exécuter son contraire.
Deux impressions se dégagent aussitôt de l'aperçu rapide que nous venons de prendre des symptômes obsessionnels. La première, c'est qu'ils sont le théâtre d'un combat opiniâtre contre le refoulé, combat qui tourne de plus en plus au désavantage des forces refoulantes, et la seconde que moi et surmoi prennent ici une part spécialement importante à la formation de symptôme.
La névrose obsessionnelle est, à n'en pas douter, l'objet le plus intéressant et le plus fécond de la recherche analytique. Mais le problème qu'elle pose n'est toujours pas dominé. Il faut avouer que si nous voulons pénétrer plus avant sa nature, nous ne pouvons encore nous dispenser d'avancer des hypothèses incertaines et des suppositions dépourvues de preuves. Dans la névrose obsessionnelle, la situation, au départ, n'est sans doute pas différente de celle de l'hystérie, à savoir la défense nécessaire contre les revendications libidinales du complexe d’œdipe.
Ajoutons que dans chaque cas de névrose obsessionnelle il parait bien que l'on peut trouver, au niveau le plus profond, une couche de symptômes hystériques formés très tôt. Mais, par la suite, un facteur constitutionnel modifie d'une manière décisive la configuration symptomatique.
L'organisation génitale de la libido se révèle plutôt faible et trop peu résistante. Lorsque le moi commence ses efforts défensifs, le premier résultat qu'il obtient est de faire régresser partiellement ou totalement l'organisation génitale (de la phase phallique) au premier stade sadique-anal. Ce fait de la régression demeure décisif pour tout ce qui se passe ensuite.
On pourrait encore considérer une autre possibilité. Peut-être la régression ne résulte-t-elle pas d'un facteur constitutionnel, mais d'un facteur temporel. Ce qui la rendrait possible ne serait pas la fragilité de l'organisation génitale de la libido, mais le fait que le moi se soit dressé trop tôt contre le processus pulsionnel, dès l'apogée de la phase sadique. Je ne me permettrai pas de trancher catégoriquement sur ce point non plus, mais je puis dire que l'observation analytique ne parle pas en faveur de cette hypothèse.
Elle tend plutôt à montrer que lors de l'entrée dans la névrose obsessionnelle la phase phallique a déjà été atteinte. De plus l'âge où éclate cette névrose est plus tardif que dans l'hystérie (deuxième période de l'enfance, après la fin de la période de latence), et, dans un cas de développement très tardif de cette affection, que j'ai pu étudier, il apparut clairement qu'une dévalorisation réelle de la vie génitale, intacte jusque-là, avait été la condition déterminante pour que la régression se fut et que se formât la névrose obsessionnelle.
Quant à l'explication métapsychologique de la régression, je la cherche dans une « désintrication des pulsions », c'est-à-dire dans le fait que les composantes érotiques, qui étaient venues s'ajouter, avec le début de la phase génitale, aux investissements destructifs de la phase sadique, s'en voient séparées.
En imposant la régression, le moi remporte son premier succès dans la lutte défensive contre la revendication de la libido. Sur ce point il convient de distinguer la tendance plus générale à la « défense », du « refoulement », qui n'est qu'un des mécanismes dont use la défense. Le cas de l'obsédé permet d'apercevoir plus clairement encore que celui de l'homme normal ou de l'hystérique que le moteur de la défense est le complexe de castration, le défendu étant constitué par les diverses tendances du complexe d’œdipe.
Nous nous trouvons maintenant au début de la période de latence, caractérisée par le déclin du complexe d’œdipe, la création ou la consolidation du surmoi et l'édification des barrières éthiques et esthétiques dans le moi. Dans la névrose obsessionnelle, ces processus dépassent la mesure normale; à la destruction du complexe d’œdipe s'ajoute la dégradation régressive de la libido; le surmoi devient spécialement sévère et dur, tandis que le moi développe, sur l'ordre du surmoi, d'importantes formations réactionnelles, qui prennent la forme du scrupule, de la pitié, de la propreté.
C'est avec une implacable, et qui, par là même, n'est pas toujours couronnée de succès, que se voit châtiée la tentation de poursuivre l'onanisme de la première enfance, qui, tout en s'étayant maintenant sur des représentations régressives (sadiques-anales) représente pourtant l'apport non dominé de l'organisation phallique. Il y a une contradiction interne dans le fait que soit empêchée, dans l'intérêt du maintien de la virilité (angoisse de castration), toute activité témoignant de cette virilité; mais le propre de la névrose obsessionnelle, c'est seulement, ici aussi, d'exagérer cette contradiction, qui est déjà inhérente à la manière normale dont est éliminé le complexe d’œdipe.
Tout excès porte en soi le germe de sa propre suppression; cela s'avère aussi dans la névrose obsessionnelle, où l'onanisme réprimé se fraye, sous la forme des actions compulsionnelles, une voie qui le rapproche sans cesse de la satisfaction.
Les formations réactionnelles que nous avons observées dans le moi du malade atteint de névrose obsessionnelle et que nous avons reconnues pour des exagérations de la formation caractérielle normale, peuvent être considérées comme un nouveau mécanisme de défense à placer à côté de la régression et du refoulement. Dans l'hystérie elles semblent absentes ou beaucoup plus faibles. Jetant un regard en arrière, nous pouvons émettre une supposition sur ce qui fait l'originalité du processus défensif dans l'hystérie.
C'est, semble-t-il, qu'il se borne au refoulement : le moi se détourne de la motion pulsionnelle désagréable, l'abandonne à son cours dans l'inconscient sans plus prendre de part à ses destins. Hypothèse qui, évidemment, ne peut se révéler absolument exacte, car nous connaissons le cas où, en même temps, le symptôme hystérique signifie l'accomplissement d'une demande de punition du surmoi; mais on peut considérer que cette vue permet de définir un caractère général du comportement du moi dans l'hystérie.
On peut admettre simplement à titre de fait que dans la névrose obsessionnelle se forme un surmoi si sévère ou bien penser que le trait fondamental de cette affection est la régression de la libido et chercher à relier aussi à cette régression le caractère du surmoi. De fait le surmoi, qui tire son origine du ça, ne saurait se soustraire à la régression et à la désintrication des pulsions qui y sont intervenues. Il n'y a pas lieu de s'étonner dès lors qu'il devienne de son côté plus rigoureux, plus tourmenteur, plus dur que là où le développement s'opère normalement.
Pendant la période de latence, la défense contre la tentation de l'onanisme semble être considérée comme la tâche principale. Cette lutte produit une série de symptômes qui se retrouvent d'une manière typique chez les personnes les plus différentes, et revêtent en général le caractère du cérémonial. Il est très regrettable que ces symptômes n 'aient pas encore été rassemblés et analysés systématiquement, car ces tout premiers produits de la névrose seraient susceptibles, mieux que les autres, d'apporter des lumières sur le mécanisme de la formation de symptôme employé ici.
Ils présentent déjà les traits qui se manifesteront plus tard dans une maladie grave de façon si funeste : tendance à se fixer sur des activités qui plus tard seront accomplies presque automatiquement, comme aller au lit, se laver, se vêtir, marcher, tendance à la répétition et à la perte de temps. Pour l'instant, on ne comprend d'ailleurs nullement pourquoi les choses se passent ainsi; toutefois le rôle joué ici par la sublimation de composantes érotiques-anales est évident.
La puberté constitue un moment décisif dans le développement de la névrose obsessionnelle. Le travail d'organisation génitale, interrompu dans l'enfance, reprend alors avec une grande force. Mais nous savons que le développement sexuel de l'enfance fixe aussi la direction de ce renouveau lors de la puberté.
C'est ainsi que, non seulement les motions agressives de l'enfance sont réactivées, mais une partie plus ou moins grande des nouvelles motions libidinales - leur totalité dans les mauvais cas - doit s'engager dans les voies qui lui ont été tracées par la régression, pour apparaître sous la forme d'intentions agressives et destructrices. Par suite de ce déguisement des tendances érotiques et à cause de l'existence dans le moi de puissantes formations réactionnelles, la lutte contre la sexualité se poursuit désormais sous la bannière de la moralité.
Le moi étonné se dresse contre les suggestions d'actes de cruauté et de violence qui lui sont dépêchées dans la conscience par le ça, sans soupçonner que par là il combat des désirs érotiques, parmi lesquels certains eussent sans cela échappé à ses reproches. Le surmoi hypersévère persiste alors d'autant plus énergiquement à réprimer la sexualité que celle-ci a pris des formes si repoussantes.
Ainsi, dans la névrose obsessionnelle, il apparaît que le conflit s'aggrave dans deux directions l'instance qui défend est devenue plus intolérante, les forces sur lesquelles porte la défense, plus insupportables, toutes deux sous l'influence d'un seul facteur : la régression de la libido:
on pourrait voir une objection à plusieurs de nos hypothèses dans le fait que la représentation obsédante désagréable accède en général à la conscience. Pourtant, aucun doute n'est permis: elle est passée auparavant par le processus de refoulement.
Dans la plupart des cas la teneur véritable de la motion pulsionnelle agressive demeure totalement inconnue du moi et il faut un travail analytique prolongé pour la rendre consciente. En règle générale, il n'en parvient à la conscience qu'un substitut déformé, tantôt imprécis et évanescent à la manière d'un rêve, tantôt rendu méconnaissable par un déguisement absurde.
Même lorsque le refoulement n'a pas entamé le contenu de la motion pulsionnelle agressive, à coup sûr cependant il a éliminé le caractère d'affect qui l'accompagne. Si bien que l'agressivité n'apparaît pas au moi comme une impulsion à agir mais, ainsi que le disent les malades, comme une simple « idée », qui devrait les laisser froids. Le plus remarquable est que ce n'est pas du tout le cas.
En effet l'affect, dont le sujet avait fait l'économie lors de la perception de la représentation obsédante, se manifeste ailleurs. Le surmoi se comporte comme s'il n'y avait pas eu de refoulement, comme s il connaissait la motion agressive dans sa teneur exacte et avec son plein caractère d'affect, et il traite le moi sur la base de cette présupposition. Le moi doit, tout en se sachant innocent ressentir un sentiment de culpabilité et endosser une responsabilité qu'il ne peut s'expliquer.
Néanmoins, l'énigme qui nous est ainsi proposée n'est pas si grande qu'il y paraît d'abord. Le comportement du surmoi est tout à fait compréhensible; quant à la contradiction dans le moi, elle nous prouve seulement qu'au moyen du refoulement il s'est fermé du côté du ça, tout en étant demeuré entièrement accessible aux influences provenant du surmoi. Si l'on demande alors pourquoi le moi ne cherche pas à se soustraire aux tourments des critiques que lui inflige le surmoi, on peut répondre que c'est bien ce qu'il fait dans un grand nombre de cas.
Il existe des névroses obsessionnelles où tout sentiment de culpabilité est absent ; dans ce cas, à ce que nous pouvons voir, le moi s'est épargné la perception de cette culpabilité par une nouvelle série de symptômes, d'actions expiatoires, de limitations autopunitives. Mais ces symptômes ont en même temps valeur de satisfaction de motions pulsionnelles masochiques que la régression a également renforcées.
La diversité des formes sous lesquelles se manifeste la névrose obsessionnelle est si considérable que, malgré tous les efforts, on n'est pas encore parvenu à donner une synthèse cohérente de toutes ses variations. Lorsqu'on s'évertue à dégager des relations typiques, on se demande toujours si l'on n'a pas négligé d'autres régularités qui ne seraient pas moins importantes.
J'ai déjà décrit la tendance générale de la formation de symptôme dans la névrose obsessionnelle. Elle tend à laisser toujours plus de champ à la satisfaction substitutive aux dépens de la frustration. Les mêmes symptômes qui, à l'origine, avaient la signification de limitations du moi, en viennent ultérieurement, grâce à la tendance du moi à la synthèse, à représenter des satisfactions, et il est impossible de méconnaître que cette dernière signification devient progressivement la plus importante.
Le résultat de ce processus, qui s'achemine de plus en plus vers l'échec complet de la lutte défensive initiale, est un moi extrêmement limité, réduit à rechercher ses satisfactions dans les symptômes. Ce déplacement des rapports de forces en faveur de la satisfaction peut conduire à l'issue redoute: paralysie de la volonté du moi, qui découvre pour chacune de ses décisions des motivations à peu près aussi fortes d'un côté que de l'autre.
Le conflit suraigu entre le ça et le surmoi, qui domine dès le début cette affection, peut prendre de telles proportions, qu'aucune des activités d'un moi désormais incapable de jouer un rôle de médiation, ne peut plus éviter d'y être entraînée.

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Conversion hystérique et imagerie fonctionnelle

 

dimanche 24 juillet 2011

Hystérie d'angoisse


Le terme a été introduit par Wilhelm Stekel en 1908. Freud le reprendra a propos du petit Hans pour souligner que de son point de vue, la phobie ne saurait constituer un processus pathologique indépendant. Il note donc une similitude structurale avec l'hystérie de conversion.

L’hystérie d’angoisse, terme introduit par Freud, désigne une névrose dont le symptôme central est la phobie. L’emploie du mot « hystérie » veut souligner la similitude structurale avec l’hystérie de conversion.
 
L'angoisse prédomine dans ce type d'hystérie. La crise d'angoisse s'annonce d'abord par la notion d'un péril dont on ne connaît pas encore la nature et qui va de plus en plus en s'amplifiant. Il peut se faire aussi qu'elle survienne sans s'annoncer. Elle entraîne un grand désarroi du sujet qui est comme fasciné par la crise qu'il sent monter en lui. La fascination peut aller jusqu'au vertige. En même temps s'installe une perplexité doublée d'appréhension très inquiétante. Quelquefois, le malade ressent une sensation de regret, de remord, d'un danger imminent.

Troubles psychosomatiques d'accompagnement


On rencontre des symptômes divers.
Au niveau des organes sensoriels et de la bouche, on constate des sueurs, des bourdonnements d'oreille, une vision brouillée ; les maux de tête sont fréquents.
On note des symptômes musculaires : des crises de tremblements qui peuvent frapper n'importe quel membre, parfois un tremblement des paupières ; ailleurs, on aura comme l'impression de crises rhumatismales.
Des symptômes urinaires sont possibles avec difficulté à uriner ou au contraire une tendance excessive aux mictions.
Les symptômes digestifs sont extrêmement variés. Ils peuvent aller d'un simple rétrécissement du pharynx à la " boule oesophagienne " ; quelquefois ces symptômes aboutissent à des nausées ou à des vomissements, à des troubles du péristaltisme intestinal pouvant conduire à la diarrhée et quelquefois aussi à des constipations totales.
Les symptômes cardiaques : ce seront des palpitations ou des troubles du rythme ; on notera ce qu'on appelle " une arythmie extra-systolique " c'est-à-dire que les contractions du coeur deviennent anarchiques. Quelquefois ces manifestations cardiaques sont telles qu'elles peuvent évoquer des crises d'angine de poitrine.
Les symptômes respiratoires peuvent aller de la simple difficulté respiratoire à la sensation de blocage complet. Ils évoquent parfois une crise de pseudo-asthme.
Les troubles du sommeil sont fréquents et variables. Ce peut être une insomnie avec des dispositions du sujet à manipuler ses conflits sans cesse pendant la nuit. Au contraire, le patient échappe parfois à l'angoisse en dormant de façon excessive.
Ces troubles schématiquement mentionnés, n'excluent pas d'autres troubles fonctionnels divers, troubles hépato-digestifs, troubles thoraciques vagues dont nous n'avons pas systématisé les manifestations. Précisons que les désirs sexuels sont souvent amoindris voire même supprimés. Mais ce n'est pas toujours le cas ; fl peut exister à l'opposé une hypertrophie du désir sexuel car dans l'acte sexuel le sujet parfois échappe à l'angoisse.
Lorsque l'on examine ces malades, on est surpris par la crispation souvent intense de leurs muscles qu'ils n'arrivent pas à détendre. Un examen fin peut détecter un tremblement des extrémités rapide et variable. Lorsque l'on frappe les réflexes, on voit qu'ils sont considérablement augmentés. L'examen cardiaque montre un électro-cardiogramme normal mais une tension artérielle un petit peu basse. Ce signe n'est pas toujours constant, il est bien certain que chez les sujets prédisposés à l'hypertension artérielle, la crise d'angoisse augmente cette dernière.


 L'anxiété est une peur irrationnelle, sans objet, disproportionnée. L'angoisse désigne les sensations physiques
qui accompagne l'anxiété (état psychique). L'anxiété peut être liée ou non à une représentation mentale, on dit
qu'elle libre (flottante) ou liée. L'angoisse flottante est présente dans la (qui est en fait
considérée comme une " pseudo-névrose ", la bouffée d'angoisse signe l'absence d'une structure névrotique
suffisamment élaborée mais il faut aussi savoir qu'elle apparaît en général dans d'autres pathologie). L'angoisse
liée intervient dans le cadre d'une névrose plus structurée (quoique les mécanismes de défenses, bien que plus
élaborés, ne suffisent pas à éviter le débordement émotionnel) : c'est (Freud). Enfin,
lorsque l'angoisse présente des attaches psychiques à certains objets ou situation il s'agit d'une
(actuellement appelée phobie).
névrose d'angoisse
l'angoisse névrotique
hystérie
d'angoisse
Classiquement il existe deux théorie de l'angoisse. La première rattache l'angoisse à une excitation libidineuse
qui ne trouve pas d'exutoire (coït interrompue, impuissante, frigidité etc.). La libido inemployée est finalement
convertie en angoisse. Un diagnostic plus fin (car l'adulte est sensé avoir appris à maîtriser sa libido) consiste à
dire que la libido qui fait surface est rattachée à un mouvement psychique ayant fait l'objet d'un refoulement.
Mais en 1926 et avec " Inhibition, symptôme et angoisse " Freud nous propose une deuxième théorie.
Le Moi est le véritable réservoir d'angoisse, menacé par le ça (qui risque de l'anéantir) d'une part et le Surmoi
d'autre part (menace de castration) le Moi tente de fuir (comme on fuit devant un danger) et pour ce faire il
cherche à éloigner le danger. La décharge pulsionnelle a finalement lieu dans une formation substitutive. Le
refoulé devient donc extérieur au Moi : le danger devient externe ce qui permet au Moi de le fuir. Le
mécanisme de défense est l'isolation.


Nevrose phobique et hystérie d'angoisse
La phobie ( du grec "phobos", peur) est une crainte angoissante déclenchée par un objet ou une situation n'ayant pas en eux-mêmes un caractère objectivement dangereux, l'angoisse disparaissant en l'absence de l'objet ou de la situation.
Le patient reconnaît le caractère absurde de sa crainte mais ne peut pas la maîtriser.
Il en résulte des conduites d'évitement caractéristiques qui se situent au-delà du contrôle volontaire.
Plus simplement, la phobie est une réaction émotionnelle anxieuse déclenchée par une situation donnée.
Elle se distingue donc :
- des pseudo-phobies de la névrose d'angoisse dues à la fixation transitoire de l'angoisse flottante;
- des obsessions phobiques où une crainte spécifique assiège l'esprit en dehors même de l'objet, comme les nosophobies ou les dysmorphophobies...
- des états psychotiques (schizophréniques ou paranoïaques)
Mécanismes
La névrose phobique fut décrite sous le terme d'hystérie d'angoisse par Freud en raison de sa parenté structurale avec l'hystérie.
La phobie serait en somme, un système de défense par sélection : on enferme l'adversité dans un seul objet, même si, par l'effet d'une loi naturelle, elle s'y accumule jusqu'à devenir explosive.
Dans les phobies, la potentialité de l'objet maudit atteint parfois des paroxysmes : le serpent, la souris, l'araignée, la guêpe peuvent déclencher chez ceux qui les ont "élues" des frayeurs qui les conduiraient à se jeter dans le vide.
Elles doivent leur force, chez l'adulte, à leur origine infantile. L'être humain passe sa vie à réactualiser ses vieilles peurs. Il est rare qu'il les ait conjurées toutes.
Pour les psychanalystes, la phobie symbolise un conflit inconscient pour éviter l'angoisse liée à une pulsion d'origine sexuelle, le conflit est déplacé sur une source extérieure sans rapport avec lui et les phobies sont étroitement liées aux inhibitions sexuelles


Cause et facteurs de risque
 

Les phobies possibles sont très nombreuses.
Dans la phobie, le névrosé se trouve devant une menace dont la véritable origine ne peut jamais être atteinte.
Les phobies en tant que symptômes sont très fréquentes et peuvent se voir dans de nombreuses affections psychiatriques à titre transitoire. Certaines phobies sont d'ailleurs considérées comme normales (vertiges, trac...).
Personnalité phobique
 

La symptomatologie phobique se développe sur une personnalité phobique.
Le caractère phobique regroupe plusieurs traits de personnalité :
- Etat constant d'alerte et de vigilance ;
- Conduite de fuite par évitement de tout engagement, par passivité et inhibition, ou par une fuite en avant.
Certains définissent la phobie comme une peur sans objet. Cependant il est quelquefois difficile de tracer la frontière entre une anxiété "normale" dans une situation phobogène et une peur pathologique dans la même situation. Tous les degrés existent entre celui qui va dominer son appréhension et celui qui va devoir modifier ou adapter sa vie pour éviter une telle situation.
Dans certains cas le phobique va pouvoir affronter certaines situations s'il est accompagné, ou s'il est en possession d'un objet censé le protéger.
Classification
Il existe plusieurs sortes de phobies :
agoraphobie (peur des espaces vides et étendus ou au contraire de la foule), claustrophobie (peur des espaces clos et étroits), phobies des moyens de transports, phobies d'impulsion (peur d'accomplir contre son gré des actes agressifs ou dangereux, peur de se jeter par la fenêtre ("j'ai peur d'avoir envie de sauter dans le vide"), phobie des instruments tranchants, des armes...
On distingue en fait trois entités :
- L'agoraphobie (phobie la plus sévère) ;
- Les phobies simples ;
- Les phobies sociales moins invalidantes. 


L'agoraphobie
 
L'aspect essentiel de l'agoraphobie est la peur d'être seul ou dans un endroit d'où le sujet ne pourrait s'échapper sans difficultés ni être secouru s'il venait à ressentir une soudaine incapacité. Ce n'est donc pas la peur spécifique de certains lieux ou situations.
Les activités normales sont progressivement réduites pendant que la peur d'avoir peur et les comportements d'évitement qui en résultent dominent la vie de l'individu.

Souvent les sujets (des femmes jeunes dans les deux tiers des cas) insistent pour être accompagnés lorsqu'ils sortent de chez eux ou cherchent à mettre en place des stratagèmes visant à se rassurer quand ils sont contraints d'affronter des situations redoutées.
Parmi celles-ci, les plus communément évitées sont les foules, les rues ou magasins fréquentés, les transports publics, les tunnels, les ponts, les ascenseurs...
Ces situations phobogènes sont généralement nombreuses et ont souvent tendance à se multiplier pour pouvoir aboutir à la nécessité d'une claustration ou à une dépendance extrême vis-à-vis de l'entourage immédiat.
Ce mode d'installation de la symptomatologie est variable; il peut être d'apparition brutale et d'aggravation rapide à la suite d'attaques de panique se succédant rapidement aboutissant à la constitution de comportements d'évitement.
L'agoraphobie est parfois associée au trouble panique ("trouble panique avec ou sans agoraphobie") ou isolée en dehors de tout antécédent de trouble panique.
Les phobies simples ou phobies spécifiques
Elles s'opposent à l'agoraphobie. Il s'agit d'une peur spécifique, isolée, irrationnelle, associée au désir d'éviter la situation ou l'objet à l'origine de cette peur. Les objets "phobogènes" sont souvent des animaux ou des objets possiblement dangereux; les situations phobogènes sont

souvent des endroits élevés ou fermés. 
Les phobies sociales

  Elles sont constituées par l'existence d'une peur irrationnelle et persistante, associée au désir d'éviter des situations dans lesquelles l'individu peut être exposé à l'observation des autres.
A cette peur s'associe celle de se comporter d'une manière humiliante ou embarrassante.

Une anxiété anticipatoire survient si l'individu est confronté à la nécessité d'affronter une telle situation qu'il souhaiterait éviter.
Relativement fréquentes sous une forme mineure, elles sont parfois invalidantes sur les plans social et professionnel. Le début est habituellement progressif sans cause déclenchante et l'évolution est marquée par l'accentuation graduelle, après la puberté, d'une sensitivité sociale.
On décrit divers types de phobies sociales : peur de parler en public (trac), de manger ou de boire en public, d'écrire devant les autres, crainte de rougir en public (éreuthophobie)...

 

Evolution de la amaldie

 L'évolution est variable.
Soit les conduites de lutte contre la phobie (contraphobiques) sont efficaces et le patient vit comme cela très bien.
Soit le patient est obligatoirement confronté aux circonstances qui provoquent la phobie (phobogènes) et il est en situation d'angoisse et de crise permanentes.
Soit les conduites contraphobiques sont invalidantes et n'autorisent plus la vie en société.
Le phobique est comme tout névrosé menacé de dépression.

 Traitement

Il n'est pas toujours nécessaire.
Lorsque la phobie n'est pas très intense, et que des conduites d'évitement peuvent être utilisées sans trop gêner la vie quotidienne, il est probablement préférable de s'abstenir : tout dépend de la souffrance du sujet et de sa demande.
Quand la phobie envahit la vie quotidienne, et gêne le patient dans sa vie quotidienne ou dans sa vie sociale, il est alors préférable de traiter. Les médicaments qui sont préconisés sont les anxiolytiques et les antidépresseurs (dans l'agoraphobie), mais les traitements non médicamenteux sont importants : psychothérapie ou psychanalyse, thérapie comportementale ou cognitive, relaxation, déconditionnement...