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| Il semble que le rêve ait un sens, mais un sens caché, qui se substitue à un autre processus de pensée et qu'il n'est, pour comprendre exactement ce sens caché, que de savoir comment c'est faite la substitution.
1 ) On distingue deux interprétations :
-L'interprétation symbolique : on considère le contenu du rêve comme un tout et cherche à lui substituer un contenu intelligible et en quelque sorte analogue. Cette interprétation échoue devant les rêves qui ne sont pas seulement incompréhensible, mais encore confus. Exemple de Joseph dans la Bible : Pharaon rêve de sept vaches maigres dévorant sept vaches grasses : c'est une prédiction symbolique des sept années de famine en Egypte qui dévorerait tout ce que les années d'abondance ont accumulés de réserve. La plupart des rêves artificiels crées par les poètes sont destinés à être ainsi interprétés symboliquement : ils rendent la pensée de l'auteur sous un déguisement où notre expérience découvre les caractères de nos propres rêves. Le succès de cette méthode d'interprétation dépend de l'ingéniosité, de l'intuition immédiate.
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| -La méthode de déchiffrage : on considère le rêve comme un écrit chiffré où chaque signe est traduit par un signe au sens commun, grâce à une clef fixe. On tient en compte, non seulement du contenu du rêve, mais encore de la personnalité et des circonstances de la vie du rêveur : tel détail a une autre signification pour l'homme riche, marié que pour l'homme pauvre, célibataire. La caractéristique de ce procédé est que l'interprétation ne porte pas sur l'ensemble du rêve, mais sur chacun de ses éléments, comme si le rêve était un conglomérat où chaque fragment doit être déterminé à part. Ce sont très certainement les rêves discordants et confus qui ont fait naître l'idée de la méthode de déchiffrage.
Ces deux procédés populaires d'analyse du rêve sont évidemment tout à fait inutilisables pour la recherche scientifique. La méthode symbolique est d'une application limitée, on ne peut en faire un système général. La méthode de déchiffrage dépend elle tout entière de la clef, « clef des songes » et rien ne garantit celle-ci.
L'interprétation freudienne est une analyse « en détail » et non « en masse », elle considère le rêve comme un conglomérat de faits psychiques. Les rêves des adultes sont le plus incompréhensible et ne ressemblent guère à la réalisation d'un désir. En effet, pour Freud, le rêve n'est que l'accomplissement (déguisé) d'un désir (refoulé). Les rêves d'adultes ont subi une défiguration, un déguisement : leur origine psychique est très différente de leur expression dernière. Il y a donc d'une part le rêve tel qu'il nous apparaît, le « contenu manifeste » et l'ensemble des « idées oniriques latentes », que l'on suppose présider au rêve du fond même de l'inconscient. Le contenu manifeste du rêve est le substitut altéré des idées oniriques latentes et cette altération est l'œuvre d'un « moi » qui se défend. Elle naît de résistances qui interdisent absolument aux désirs inconscients d'entrer dans la conscience à l'état de veille ; mais, dans l'affaiblissement du sommeil, ces forces ont encore assez de puissances pour imposer du moins aux désirs refoulés un masque qui les cache et les rend incompréhensible à la conscience du rêveur.
Il suffit de substituer au contenu manifeste si abracadabrant le sens profond pour que tout s'éclaire : on voit que les divers détails du rêves se rattachent à des impressions de jours précédents (surtout la veille) et l'ensemble apparaît comme la réalisation d'un désir insatisfait et d'évènements de la veille.
On peut donc écrire:
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| Deux grandes forces concourent à la formation d'un rêve : les tendances et le système. L'une construit le désir exprimé par le rêve, l'autre le censure et par suite cela déforme l'expression du désir.
Le « travail onirique » consiste au passage des idées inconscientes en contenu manifeste. Il existe deux processus essentiels : la condensation et le déplacement. Ce travail est semblable au travail d'altération qui transforme les complexes refoulés en symptômes, lorsque le refoulement échoue. Il faut vraiment comparer le rêve à l'écrivain qui redoutant la censure, modère et déforme l'expression de sa pensée. L'inconscient se sert, surtout pour représenter les complexes sexuels, d'un certain symbolisme, qui parfois varie d'une personne à l'autre mais qui a aussi des traits généraux et se ramène à un certain type de symbole.
L'empereur et l'impératrice, le roi et la reine représentent le plus souvent les parents du rêveur ; il est lui-même le prince ou la princesse. La même haute autorité peut-être attribuée à des grands hommes. Tous les objets allongés ; bâtons, troncs d'arbres, parapluies (à cause du déploiement comparable à celui de l'érection), toutes les armes longues représentent le membre viril. Les boîtes, les coffrets, les caisses, les armoires, les poêles, les chambres représentent le corps de la femme. L'acte sexuel est représenté, lui, par la lime à ongle, les sentiers escarpés, les échelles et bien sûr, symbole phare de Freud, l'escalier. La description des différentes entrées et sorties ne peut pas tromper : on comprend dès lors l'importance de savoir si la pièce est fermée ou ouverte…
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| 2 ) Le travail de condensation :
Le rêve est bref , pauvre, laconique, comparé à l'ampleur et à la richesse des pensées du rêve. Écrit, le rêve couvre à peine une demi-page ; l'analyse, où sont indiquées ses pensées, sera, six ou sept fois plus étendue. Le rapport peut varier avec les rêves, mais ainsi que Freud a pu s'en rendre compte, il ne s'inverse jamais. En général, on sous-estime l'étendue de cette compression ; on considère qu'il n'y a pas d'autres éléments que les pensées découvertes, on néglige toutes celles qui sont cachées derrière le rêve et qu'une interprétation plus étendue pourrait nous découvrir. Faut-il expliquer la disproportion entre le contenu du rêve et les pensées du rêve exclusivement par un travail de condensation énorme du matériel
psychique ? Nous avons bien souvent l'impression que nous avons oublié la plus grande partie de nos rêves. Le rêve que nous nous rappelons au réveil ne serait alors qu'un reste de l'ensemble du travail du rêve, qui aurait la même étendue que les pensées si nous pouvions les rappeler tout entier. Tout le monde a pu constater qu'un rêve est reproduit plus fidèlement, lorsque l'on cherche à se le rappeler au réveil, que vers le soir où nous n'en retrouvons que quelques bribes. Le fait que nous pouvons oublier nos rêves ne contredit d'ailleurs nullement l'hypothèse d'une condensation, celle-ci demeure prouvée par la quantité des représentations appartenant aux fragments non oubliés du rêve. Même si une grande part du rêve a échappé à la remémoration, cela ne peut que nous avoir ôter l'accès à un autre groupe de pensées. Rien, en effet, ne prouve que les parties oubliées se rapportent aux pensées que celles que l'analyse de ce qui subsiste nous à permis d'atteindre.
Exemple de condensation : Freud rêve qu'il est assis dans un compartiment de train et qu'il a sur ses genoux un chapeau haut-de-forme transparent. Voici comment il interprète cette condensation. D'une part, le chapeau évoque la respectabilité, d'autre part, il est transparent. Ses associations lui évoquent un bec Auer utilisé pour les expériences de chimie. Cet instrument avait été inventé par un médecin contemporain de Freud qui en avait tiré profit et gloire. Comme Auer, Freud désirait faire fortune avec une invention qui lui assurerait la considération de ses concitoyens.
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| 3) Le travail de déplacement :
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| En rassemblant des exemples de condensation dans le rêve, nous avons remarqué que les éléments qui nous paraissaient essentiels pour le contenu ne jouaient dans les pensées du rêve qu'un rôle très effacé. Inversement, ce qui est visiblement l'essentiel des pensées du rêve n'est parfois pas du tout représenté dans celui-ci. Le rêve est autrement centré, son contenu est rangé autour d'éléments autres que les pensées du rêve. Nous savons bien quels sont les éléments essentiels, nous le savons d'une manière immédiate. Or, lors de la formation du rêve, ces éléments chargés d'un intérêt intense, peuvent être traités comme s'il n'avaient qu'une faible valeur, et d'autres, peu importants dans les pensées du rêve, prennent leur place. Il semble d'abord que l'intensité psychique des diverses représentations ne joue aucun rôle pour leur choix dans le rêve et que joue uniquement la complexité de leur détermination. Les détails du contenu manifeste sont assez révélateurs du contenu latent le plus important. Dans l'analyse, on privilégie donc l'étude des éléments les plus insignifiants pour remonter au contenu latent. De ce fait, on a des déplacement de pensées et de désirs interdits ou conflictuels sur des objets anodins pour les rendre acceptables au conscient. On pourrait supposer que ce qui apparaît dans le rêve n'est pas ce qui était important dans les pensées du rêve, mais plutôt ce qui y était souvent répété.
Le processus primaire rassemble trois transformations plus une :
-la figuration du rêve :
En effet, le rêve ne présente que des éléments figurés (perçus et surtout visualisés). Le rêve raconte à la façon du film muet, il peut citer, répéter des paroles réellement prononcées, mais il lui faut absolument montrer à nos sens ce qu'il raconte. S'il doit dire que quelqu'un n'est pas là, il le mettra en scène puis le fera disparaître.
De même, toute formulation abstraite sera illustrée, se verra remplacer par un élément ou ensemble concret comme un emblème, un symbole, une métaphore, etc...
-la condensation
-le déplacement
-la séquence dans laquelle sont rassemblés les éléments inconscients qui forment un rêve se présente élaborée secondairement, de façon le plus souvent rudimentaire, en un scénario narratif ou dramatique que Freud nomme, la « façade du rêve », le minimum formel nécessaire pour que cela puisse être raconté.
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| 4) Un rêve et son interprétation :
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| « Je veux donner un dîner, mais je n'ai pour toute provision qu'un peu de
saumon fumé. Je voudrais aller faire des achats, mais je me rappelle que c'est dimanche après-midi et que toutes les boutiques sont fermées.
Je veux téléphoner à quelques fournisseurs, mais le téléphone est détraqué. Je dois donc renoncer au désir de donner un dîner. »
Le mari de cette malade est boucher. Elle en est très éprise et le taquine sans cesse. Elle a demandé à son mari de ne pas lui donner de caviar. En réalité, elle souhaite depuis longtemps avoir chaque matin un sandwich au caviar et elle l'aurait, si elle en parlait à son mari. En fait, cette personne veut se créer un désir dans la vie insatisfait et ce rêve lui montre. Après une certaine insistance de Freud, la malade lui dit qu'elle a rendu visite la veille à son amie dont elle est fort jalouse parce que son mari en dit toujours beaucoup de bien. Fort heureusement, l'amie est mince et maigre, et son mari aime les formes pleines.
De quoi parlait donc cette personne maigre ? Naturellement, de son désir d'engraisser. Elle lui a demandé : « Quand nous inviterez-vous à nouveau ? On mange toujours si bien chez vous. » Le sens du rêve apparaît clair maintenant, c'est comme si en rêve la malade lui avait répondu mentalement : « Oui ! Je vais t'inviter pour que tu manges bien, que tu engraisses et que tu plaises plus encore à mon mari ! J'aimerais mieux ne plus donner de dîner de ma vie ! » Le rêve dit qu'elle ne peut donner de dîner ; il accomplit ainsi son vœu de ne point contribuer à rendre plus belle votre amie. Cependant, il manque encore à quoi le saumon fumé répond dans le rêve. « C'est, dit-elle, le plat de prédilection de mon amie. »
Une autre interprétation est aussi possible, sans contredire la précédente, et prouve le double sens que recouvrent les rêves. La malade s'efforçait dans la réalité de combler un de ses désirs (le sandwich au caviar).
L'amie avait aussi exprimé un vœu, celui d'engraisser, et il n'y aurait rien d'étonnant à ce que la malade eût rêvé qu'un souhait de son amie ne s'accomplit pas. Mais, au lieu de cela, elle rêve qu'elle même voit un de ses désirs non accompli. Le rêve acquiert un sens nouveau, s'il n'est pas question d'elle mais de son amie, elle s'est identifiée à elle.
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